Malgré l’opposition de Québec et de la direction du Bureau des enquêtes indépendantes (BEI), le Tribunal administratif du travail (TAT) a accrédité mercredi le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), section locale 5409, qui peut maintenant représenter la quarantaine d’enquêteurs du BEI.

La demande d’accréditation a été déposée par la centrale syndicale le 12 février dernier, alors que le BEI comptait 28 enquêteurs, selon la décision du TAT. Les enquêteurs sont des policiers retraités et des civils. Les enquêteurs superviseurs ne pourront toutefois pas être syndiqués.

Le BEI, qui est entré en activité en juin 2016, a pour mandat d’enquêter sur les évènements impliquant des policiers ou des agents de la paix au cours desquels au moins une personne a été blessée ou a péri, et sur les allégations d’agression sexuelle impliquant des policiers. Depuis octobre dernier, le BEI dirige aussi une équipe de 14 enquêteurs chargés de faire la lumière sur les fuites à l’Unité permanente anticorruption (UPAC) et sur la façon dont celle-ci a mené l’enquête sur des fuites à l’issue de laquelle le député Guy Ouellette a été arrêté en octobre 2017, mais jamais accusé.

C’est également le BEI qui a chapeauté les enquêteurs de l’équipe mixte chargée de se pencher sur les allégations qui ont éclaboussé les enquêtes internes du SPVM.

La directrice du BEI est une ancienne procureure spécialisée dans la lutte contre les motards criminels, MMadeleine Giauque.

PHOTO ANDRÉ PICHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Me Madeleine Giauque, directrice du Bureau des enquêtes indépendantes

Comme les policiers

Le gouvernement du Québec et le Bureau des enquêtes indépendantes s’opposaient à l’accréditation syndicale des enquêteurs, puisque, selon eux, ils ne sont pas des salariés au sens du Code du travail et qu’il n’y a pas, entre eux et la direction du BEI, de lien de subordination juridique, qui caractérise une relation employés-employeur.

Dans sa décision, le Tribunal administratif du Québec compare la situation et le travail des enquêteurs du BEI à ceux des policiers du Service de police de la Ville de Montréal, de la Sûreté du Québec et de l’UPAC, seul autre corps de police spécialisé et indépendant au Québec.

Selon le TAT, bien que la directrice Giauque ne puisse pour le moment exercer d’autorité disciplinaire en raison de l’absence d’un règlement de discipline, elle évalue les enquêteurs, ce qui peut avoir un impact sur leur rémunération et le renouvellement de leur mandat de cinq ans. Elle rapporte aussi les comportements problématiques – comme cela a été le cas avec un enquêteur qui aurait manqué de jugement au volant d’un véhicule –, elle contrôle les horaires et les allocations de dépenses et elle a instauré certaines conditions de travail qui ne sont pas prévues au contrat, telles une banque de congés et une rémunération pour le travail effectué en dehors des heures normales.

« En conclusion, non seulement l’encadrement législatif n’exclut pas que les enquêteurs du BEI soient dans une relation d’emploi, mais, au contraire, il confirme qu’ils sont des salariés au sens du Code : ils accomplissent du travail de policier, dans des balises bien définies, avec certes une indépendance professionnelle, mais dans la ligne de commandement et sous l’autorité de la directrice », écrit Irène Zaïkoff, juge administrative au TAT, dans sa décision de 17 pages.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4019, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.