Cinq enfants, sept petits-enfants, de magnifiques souvenirs, une cruelle absence et une immense souffrance. C'est ce qui reste à Yamina Boukala depuis que l'homme avec qui elle était mariée depuis 42 ans, Mohammad Nehar Belaid, a été assassiné.

Le chauffeur de taxi de 64 ans est mort poignardé à 10 reprises, le soir du 29 novembre 2009, manifestement pour l'argent qu'il avait sur lui.

Mme Boukala, une petite femme d'une grande douceur, n'a pas réussi à dire tout ce qu'elle voulait à la juge Sophie Bourque, ce matin, lors des plaidoiries sur la peine qui doit maintenant échoir à Nigel John, l'assassin de son mari. Mme Boukala s'est sentie mal, a pâli et a finalement été emmenée en ambulance. C'est une de ses filles, Najat, qui a pris le relais et lu la lettre de sa mère. «Ma peine quotidienne est de s'asseoir pour dîner à une table où il n'est plus là, sa place est vide...», disait notamment la lettre. L'homme était à quelques mois de sa retraite.

Pesante tristesse

La tristesse et la peine étaient écrasantes ce matin dans la salle d'audience, tant du côté de la Couronne et de la famille de la victime que du côté de la défense et de la famille de l'accusé. Ce dernier, chaînes aux pieds, s'est avancé à la barre. En se frottant nerveusement les mains, il a dit ne pas comprendre ce qui est arrivé ce soir-là, lui qui n'est pas violent d'habitude. Il s'est excusé d'avoir brisé deux familles, il s'en veut.

La mère de l'accusé a ensuite pris la parole. En pleurant abondamment, elle a raconté que Nigel avait toujours été différent, même dans son enfance. Il ne parlait pas, n'avait pas d'ami. Il s'est réfugié dans la drogue et l'alcool, a été hospitalisé pendant un mois en psychiatrie à un certain moment, sans qu'on sache de quoi il souffrait.

«Il a souffert en silence», a-t-elle dit. Elle a indiqué que son fils n'est pas responsable, ne fait pas son épicerie, ne s'est jamais acheté un seul vêtement. C'est toujours elle qui devait voir à ses besoins.

«Des fois je me dis que si j'avais fait plus...» a dit la mère en sanglotant. La juge Bourque lui a alors dit qu'elle ne devait pas se sentir coupable et qu'elle n'était pas responsable de ce qui était arrivé. «Vous avez fait de votre mieux.»

Nigel John, 30 ans, a été déclaré coupable de meurtre non prémédité au terme de son procès, la semaine dernière. Cela lui vaut la prison à vie, mais la juge doit fixer le nombre d'années qu'il devra purger avant de devenir admissible à une libération conditionnelle. Cette période peut s'échelonner de 10 à 25 ans. Dans cette affaire, la procureure de la Couronne Hélène Di Salvo recommande que cette période soit de 15 ans, tandis que l'avocate en défense, Alexandra Longueville, demande 10 ans. La juge Bourque rendra sa décision vendredi prochain.