La Cour suprême a maintenu l'acquittement d'une femme qui s'était établie dans une tente au milieu de la plantation de cannabis exploitée par son fils, sur son terrain à elle, à La Macaza, en août 2006.

Au terme de son procès en Cour du Québec, Nicole Rochon avait été déclarée coupable de production et de possession de cannabis à des fins de trafic. La femme n'habitait pas à cet endroit habituellement. Elle s'y était rendue vers la mi-juillet 2006 et avait installé une tente à 217 m de sa maison, qu'elle jugeait insalubre. Les policiers se sont rendus sur les lieux le 22 août 2006. Ils ont réalisé que des sentiers partaient de l'emplacement de la tente et menaient à sept îlots de plantation, où poussaient 880 plants de marijuana. Il y avait de petites quantités de marijuana et de haschisch dans la tente de la femme, et des objets servant à la culture non loin. Il y avait aussi des plants dans la cave de la maison, du cannabis en vrac et des cocottes dans le congélateur. La femme se rendait régulièrement dans la maison, notamment pour faire sa toilette.

Mme Rochon s'était défendue en disant qu'elle avait confié la propriété à son fils plusieurs années auparavant et qu'elle avait découvert les plants fortuitement en y retournant. Elle avait demandé à son fils à deux reprises que «ça disparaisse», car elle ne voulait pas de problèmes, d'autant plus qu'elle avait des antécédents judiciaires.

Elle avait admis consommer de la marijuana depuis 40 ans. Elle n'avait pas appelé la police, pour ne pas dénoncer son fils, et aussi parce qu'elle se disait «antirépression». La femme n'avait pas de revenu.

Le juge Paul Chevalier a reconnu qu'au Canada, la simple présence sur la scène d'un crime et l'acquiescement passif ne suffisent pas à engager la responsabilité criminelle d'une personne. Il n'y a pas d'obligation légale à dénoncer un crime. Mais le juge n'a pas cru des pans de la version de la quinquagénaire. Il a estimé que par son inaction, la femme avait démontré qu'elle consentait à ce que l'infraction soit commise. Elle avait à tout le moins aidé par omission.

Me Alexandre Bergevin et Me Julie Giroux en ont appelé de la condamnation de Mme Rochon, avec succès. Dans une décision partagée, la Cour d'appel a acquitté la femme. Le juge de première instance n'avait fait mention d'aucune preuve de gestes de production et de possession dans le but de trafic. Ce qu'il lui reprochait, c'était sa présence, sa connaissance et sa passivité, ce qui ne suffit pas, ont conclu deux des juges.

Le ministère public débouté

Cette fois, c'est le ministère public qui a porté l'acquittement en appel à la plus haute instance du pays, la Cour suprême. L'affaire a été plaidée au début de la semaine. Chose rare, les juges se sont retirés pour un bref délibéré, en demandant aux parties d'attendre. Ils sont retournés un peu plus tard et ont confirmé, à six juges contre un, l'acquittement de Mme Rochon. Cette décision vient clore le feuilleton.

Me Alexandre Bergevin estime que dans cette affaire, «l'État a tenté de criminaliser l'omission». Il s'est évidemment réjoui de l'issue de cette affaire.