«Si je veux tuer quelqu'un, je vais aller à la chasse.»

Interrogé par les policiers durant six heures au lendemain de son arrestation, le 6 novembre 2009, Claude Larouche a lâché cette phrase qui est revenue le hanter, mardi, à son procès.

Pour la deuxième journée consécutive, l'homme de 49 ans accusé du meurtre prémédité de Natasha Cournoyer a fait l'objet d'un contre-interrogatoire serré mené par la poursuite.

Larouche admet aujourd'hui avoir tué Natasha Cournoyer, mais il assure qu'il n'en avait pas l'intention. Il parle d'un «incident». Il soutient d'ailleurs que sa victime a accepté de le suivre au motel Lido, à Laval, et qu'elle lui a même offert des faveurs sexuelles.

Or, ce n'est pas la version qu'il a donnée aux enquêteurs au lendemain de son arrestation. Au cours de cet interrogatoire filmé, l'enquêteur Jean-François Pagé lui a demandé de décrire ce qui s'était passé le 1er octobre 2009, jour de la disparition de la fonctionnaire de 37 ans.

«Regarde, continue ton casse-tête. Si je veux tuer quelqu'un, je vais aller à la chasse. Si je veux du sexe, je sais où aller, lui a répondu Larouche d'un ton hostile.

- Es-tu allé à la chasse, ce soir-là, Claude?», a poursuivi l'enquêteur.

Assis, les bras croisés, Larouche s'est emporté en disant qu'il n'était pas un chasseur. «On a tes images et ton ADN», a insisté le policier.

«Si t'es sûr, amène ça et on verra», lui a lancé l'accusé.

Les jurés ont visionné ces extraits de l'interrogatoire, mardi. Placé devant ses déclarations antérieures, l'accusé a nié fermement avoir eu Natasha Cournoyer comme proie. «Si je voulais aller à la chasse, j'irais à la chasse. Si je voulais aller à la pêche, j'irais à la pêche. Si je voulais aller aux femmes, j'irais aux femmes», a-t-il précisé, mardi, visiblement excédé par les nombreuses questions de la poursuite.

Tout comme la veille, l'accusé a rendu un témoignage ponctué de trous de mémoire. Il ne se souvient pas de ce qu'il a fait durant les 46 minutes qu'il a passé dans sa fourgonnette avec la victime avant de quitter le stationnement de Place Laval vers le motel Lido.

Il ne se souvient pas de l'avoir ligotée ni bâillonnée, comme le suggère le rapport d'autopsie. Les marques qu'elle avait aux commissures de la bouche ont peut-être été faites lorsqu'elle s'est emmêlée dans la bandouillère de son sac à main au cours de leur affrontement, a-t-il dit.

L'accusé se souvient toutefois d'avoir nettoyé la table où il a consommé de la cocaïne avant de quitter le motel. Une question de «savoir-vivre», a-t-il indiqué.

Claude Larouche avait l'habitude de faire appel aux services d'une prostituée lorsqu'il louait une chambre de motel bon marché. Ce jour-là, le menuisier a quitté le travail vers midi. Il a raconté plus tôt au procès s'être acheté 18 quarts de gramme de cocaïne et 10 roches de crack pour les consommer au motel Lido.

Insatisfait de la qualité des roches, il a décidé d'en acheter d'autres. Il a alors appelé un autre vendeur qui lui aurait donné rendez-vous à la Place Laval.

Une fois dans le stationnement, Larouche a dit avoir été surpris par l'arrivée «à la course» de Natasha Cournoyer, dont le véhicule était garé à côté de celui de l'accusé. Selon son récit, ils se sont bagarrés; elle s'est retrouvée dans sa fourgonnette, puis il a fermé la porte.

Une «très importante» quantité de drogue

Le deuxième témoin de la défense, le pharmacologue Louis Léonard, estime pour sa part que Larouche a consommé une quantité «très importante» de drogue ce jour-là.

Une telle dose peut causer un effet de «paranoïa» chez le consommateur de longue date, comme c'est le cas de l'accusé. «La personne est aux aguets, prête à fuir, prête à lutter», a indiqué ce spécialiste des drogues.

La consommation de cocaïne jointe à celle du crack (même substance, mais sous une forme différente) multiplie les effets de la substance, selon l'expert, qui poursuit son témoignage aujourd'hui. Mardi, le Dr Léonard n'a pas eu le temps d'aborder ses conclusions.

L'accusé ne connaissait pas sa victime. La fonctionnaire de 37 ans a disparu le 1er octobre 2009 après avoir quitté son travail vers 20h, à Laval. Son corps a été retrouvé le 6 octobre par un col bleu, tout à fait par hasard. Claude Larouche a été arrêté un mois plus tard, le 5 novembre, trahi par son ADN.