Onze et quinze ans, c'est bien jeune pour voir leur père poignarder leur mère 50 fois.

C'est pourtant ce qu'ont vécu deux enfants, le 26 août 2009, à Montréal. Hier, alors qu'elles témoignaient dans le cadre des plaidoiries sur la peine à infliger à leur père, les deux adolescentes ont raconté avec une émouvante candeur comment ce drame a changé leur vie. Une chape de tristesse s'est alors abattue sur la salle d'audience. Même les hommes avaient la larme à l'oeil.

«Depuis que ma maman est décédée, j'ai beaucoup changé. J'ai dû faire plein de choses pour la première fois sans ma mère, comme fêter Noël et mon anniversaire... J'aurais voulu qu'elle soit présente tout au long de ma vie... Dès que je ferme les yeux, je vois mon père, et je fais des cauchemars. Dans ceux-ci, il me tue», a dit la plus jeune, maintenant âgée de 12 ans.

«Ma relation avec ma mère était parfaite. La complicité que nous avions était beaucoup trop forte pour que quelqu'un puisse nous séparer... Ma mère était une femme inspirante, belle, intelligente, chaleureuse, forte et généreuse. C'est comme elle, plus tard, que je voudrais être», a dit sa soeur, qui a 16 ans aujourd'hui.

Les deux filles, devenues pour ainsi dire orphelines, vivent aujourd'hui avec une tante. Leur univers a basculé, et elles ont dû très tôt faire face à des problèmes d'adulte, comme s'occuper des funérailles de leur mère ou fermer des comptes bancaires, parce que la tante ne parle pas bien français. Hier après-midi, elles étaient assises dans la première rangée de la salle d'audience et se tenaient par la main. La plus jeune serrait sur elle une grosse peluche blanche ornée d'un coeur rouge. Elles regardaient souvent en direction de leur père, assis dans le box des accusés, mais lui fuyait leur regard.

Le 20 septembre dernier, alors que devait s'ouvrir son procès devant jury, l'homme a plaidé coupable à une accusation de meurtre non prémédité. Le drame est survenu en début de nuit, le 26 août 2009, dans la demeure familiale. Dans une crise de colère et de jalousie, il a poignardé sa femme à 50 reprises devant ses deux filles. La victime, âgée de 37 ans, faisait à peine 1m50 et ne pesait que 46,5 kg. Les filles ont tenté sans succès de s'interposer. Elles ont même été blessées, notamment la plus jeune, qui a été coupée aux mains.

L'homme était fortement intoxiqué par l'alcool, et son urine contenait des traces de cocaïne.

L'accusé écope automatiquement de la prison à vie. Il reste maintenant à déterminer combien de temps il devra obligatoirement rester en prison avant de devenir admissible à une libération conditionnelle.

La procureure de la Couronne Hélène Di Salvo et l'avocat de la défense Louis Huot recommandent de fixer cette période à 15 ans. Le juge Claude Champagne rendra sa décision le 22 octobre.