Devant la rivière, la casquette enfoncée sur les oreilles et les verres fumés sur le nez, le beau-père d'Hugo Pereira faisait les cent pas. Comme plusieurs proches rencontrés sur place, il se résignait au plus sombre scénario.

«On appréhendait déjà le pire. Ça fait une semaine qu'on ne sait pas sur quel pied danser. Enfin on va avoir un dénouement, on s'attendait à ça... Ou bien c'était un crime grave, ou bien c'était ça», a laissé tomber Bernard Sauvé, durement secoué.À l'instar des autres proches, M. Sauvé pestait contre ce cauchemar qui n'arrive d'ordinaire qu'aux autres: la mort possible de deux jeunes hommes sérieux, sans histoire, promis à un brillant avenir. «C'était tellement de bons petits gars, c'est ça qui arrache le coeur», a soupiré M. Sauvé.

Avant leur disparition, tout semblait réussir aux deux jeunes. Après avoir étudié à l'Institut de protection contre les incendies du Québec (IPIQ), ils caressaient toujours le même rêve: devenir pompiers. Originaire de Saint-Hyacinthe, Vincent, sportif réservé qui jouait au hockey junior, était inscrit cette année en technique incendie au collège Montmorency et s'apprêtait à proposer ses services comme pompier à Longueuil.

Hugo Pereira poursuivait pour sa part ses études à l'UQAM dans l'espoir d'enseigner à l'IPIQ, en plus de travailler comme préposé aux bénéficiaires à l'hôpital Louis-H. Lafontaine. «Hugo avait une belle carrière devant lui, tout lui souriait», a résumé Bernard Sauvé.

Réal Leboeuf, oncle de Vincent Lamoureux, ne se berçait pas d'illusions. «C'est sûr qu'on souhaiterait que ce ne soit pas des morceaux de l'auto, mais on souhaite surtout trouver les corps», a-t-il dit, atterré.

Quelques heures plus tôt, son fils Jonathan et une vingtaine de personnes installaient toujours des affiches des disparus dans le métro montréalais.

Près de 200 personnes, dont plusieurs camarades de classe des disparus, devaient aussi se rassembler hier soir devant le bar Le Diable Vert pour faire progresser les recherches.

En fin de journée, les trois colocataires de Vincent et Hugo se sont présentés à leur tour en bordure de la rivière, le visage long, vêtus de leur uniforme scolaire. «Le moral à la maison est assez bas. Ça nous dérange de l'admettre, mais ça fait un petit bout qu'on s'attend à les trouver morts. Mais on préfère trouver les corps que de continuer à vivre l'angoisse de l'attente», adit l'un d'eux, Philippe Ouellet.

Il n'avait que de bons mots pour ses deux amis, Vincent le réservé, surnommé Lamou, mais surtout Hugo, qu'il côtoie depuis plusieurs années. «C'est un gars extrêmement sérieux, diplomate, qui s'occupait de tout à la maison. Je l'appelais maman», a souligné le colocataire, sourire en coin.

Derrière lui, un avis de recherche des disparus était placardé sur un lampadaire, à quelques mètres de la rivière.