Au lendemain de la violente agression qui a failli coûter la vie à un de leur collègue, les chauffeurs de taxi interrogés ce matin réclament à nouveau une meilleure protection.

À nouveau, puisque ce n'est pas la première fois qu'ils plaident en faveur de l'installation d'une vitre de sécurité entre le conducteur de la banquette arrière. Les agressions violentes et vols sont fréquents dans l'univers des taxis et chaque chauffeur a vécu son lot de mésaventures.

Pour s'en rendre compte, il suffit de parler avec ceux qui étaient garées en bordure d'un parc de la rue Girouard, ce matin, dans l'arrondissement Notre-Dame-de-Grâce.

C'est à un jet de pierre de là qu'un de leur confrère de 49 ans a été agressé au début de la nuit dernière. Pour une raison encore inconnue, sa passagère l'a poignardé à plusieurs reprises au haut du corps après avoir grimpé dans sa voiture vers 1h du matin. La victime est parvenue à s'extirper de son véhicule, pour ensuite trouver de l'aide tout près, à l'angle des rues Sherbrooke et Marcil.

La femme, inconnue des milieux policiers, a été rattrapée un peu plus loin par des patrouilleurs du Service de police de la ville de Montréal.

Ce matin, des restes de cordons policiers et des traces de sang sur le trottoir étaient les seuls vestiges de l'agression.

Mais les conducteurs de taxi savent qu'ils ne sont jamais à l'abri du danger. «J'ai très peur, un de mes amis a récemment eu un fusil pointé sur lui par des voleurs», raconte Yaghoob Ghanbar, qui a justement cessé de travailler la nuit après 16 ans justement à cause du danger. Lorsqu'on lui demande s'il a lui-même été attaqué, il se signe de la croix en murmurant «Non, merci mon Dieu.»

Lui et ses collègues de la compagnie Astral connaissent bien la victime de l'agression de la nuit dernière, un chauffeur expérimenté. Leur répartiteur leur fournit d'ailleurs de ses nouvelles d'heures en heures par le biais de leur radio. La victime est dans un état stable. Tous ont poussé un soupir de soulagement en apprenant que sa vie n'est plus en danger. «Le gouvernement devrait obliger l'installation d'une vitre de sécurité comme à New York», explique M. Ghanbar. «J'ai très peur, si ça arrive à des amis, ça peut m'arriver à moi», ajoute-t-il.

Son collègue Shaahran Ghobadi a lui aussi arrêté de rouler la nuit, pour prévenir les risques. Surtout dans ce secteur du sud-ouest, où rôdent souvent les junkies. M. Ghobadi déplore se faire régulièrement envoyer à des intersections pour chercher des clients qui refusent de donner la moindre adresse ou numéro de téléphone. «Ces gens ont parfois des choses à cacher. Je dois souvent offrir de l'argent à des clients intoxiqués pour les calmer», raconte-t-il. «Il n'y a pas de sécurité dans les voitures, ça ne coûterait pourtant pas trop cher. En attendant, on n'a pas le choix de travailler ainsi», résume le chauffeur.

Shams Nebba-Din estime pour sa part que Montréal est une ville sûre. Selon ce chauffeur, la vitre de sécurité n'empêcherait pas les agressions. «Quand ça arrive, ça arrive, ce n'est pas une vitre qui va changer ça. Montréal n'est pas une ville criminalisée comme New York», explique M. Nebba-Din, qui n'a jamais été attaqué en 30 ans de métier.

Le débat entourant la vitre de sécurité dans les taxis refait surface chaque fois que les chauffeurs font les frais d'une nouvelle agression. Ce fut le cas il y a quelques mois, lorsque deux conducteurs avaient été poignardés par trois voleurs en plein jour dans la Petite-Bourgogne.

Quant à la responsable de l'agression de cette nuit, elle devrait comparaître aujourd'hui sous des accusations de tentative de meurtre, déguisement, agression armée et vol qualifié.