Jocelyne Lizotte était incapable de s'occuper d'elle-même, à cause de la maladie d'Alzheimer, mais elle n'était pas considérée comme « en fin de vie » juste avant d'être tuée, a soutenu mercredi une médecin, au procès du mari de la victime.

La docteure Micheline Pelletier témoigne pour la Couronne au procès pour meurtre au deuxième degré de Michel Cadotte, 57 ans. Jocelyne Lizotte, sa femme malade, a été tuée en février 2017 à l'âge de 60 ans dans la chambre de son centre d'hébergement et de soins de longue durée (CHSLD).

La Couronne affirme que M. Cadotte était incapable de composer avec la détérioration de l'état de santé de son épouse des 19 dernières années, et qu'il l'a étouffée avec un oreiller.

Mme Pelletier travaille au centre Émilie-Gamelin, où Mme Lizotte a résidé entre janvier 2014 et le moment de son décès, trois ans plus tard. Elle a déclaré aux jurés que, dès son arrivée au CHSLD, Mme Lizotte souffrait déjà de la maladie d'Alzheimer à un stade avancé - elle avait en fait reçu un diagnostic de démence précoce à l'âge de 49 ans.

La docteure Pelletier a indiqué que la dame était essentiellement coupée de la réalité : elle ne pouvait ni parler, ni reconnaître ses proches, ni s'acquitter de tâches quotidiennes, et elle n'était pas capable de prendre soin d'elle-même.

La médecin a quand même soutenu que Mme Lizotte pouvait manger et marcher avec assistance, prendre un bain, et qu'elle jouissait d'un bon sommeil. Mise à part la maladie de Crohn, elle n'avait pas d'autre problème de santé majeur. Elle a expliqué que Mme Lizotte recevait des soins pour se sentir bien, mais que son état ne nécessitait pas de soins palliatifs - prodigués lorsque la mort est « imminente ».

Mme Pelletier a raconté qu'elle avait rencontré M. Cadotte quelques jours après l'arrivée de son épouse dans l'établissement. Ils ont décidé que, étant donné l'état de santé de la dame, elle ne recevrait que des soins de réconfort, et une « ordonnance de ne pas réanimer » avait été inscrite à son dossier médical. Selon la docteure Pelletier, l'état de santé de Mme Lizotte est demeuré pratiquement inchangé pendant ses trois années passées au CHSLD.

M. Cadotte, quant à lui, était souvent aux côtés de sa femme. Il venait la voir régulièrement, marchait avec elle, l'aidait à manger, s'est rappelée la médecin. Il craignait surtout, en fait, que le dosage du médicament ne soit responsable de la progression rapide de la maladie d'Alzheimer.

En contre-interrogatoire, l'avocat de M. Cadotte, Nicolas Welt, a abordé avec la docteure Pelletier l'absence de consensus médical sur ce qui constitue la « fin de vie ». La médecin a rappelé que la loi sur l'aide médicale à mourir est justement remise en cause devant les tribunaux ces jours-ci parce qu'on ne s'entend pas sur cette notion de « fin de vie ».