Si Leonardo Rizzuto est « l'éléphant dans la pièce », c'est qu'il le veut bien. Et c'est l'ensemble de cette pièce qu'il faut regarder. C'est ainsi que l'on pourrait résumer la réplique faite jeudi par le procureur de la Poursuite, Me Matthew Ferguson, à l'avocat du fils cadet du défunt parrain de la mafia montréalaise, Vito Rizzuto, qui subit depuis mercredi son procès pour possession d'armes et possession de cocaïne.

D'emblée, Leonardo Rizzuto a présenté une requête pour faire casser le mandat de perquisition qui a permis aux policiers de fouiller sa maison de Laval le 19 novembre 2015, et de trouver deux pistolets - dont l'un chargé - et cinq grammes de cocaïne. Si le mandat tombe, les accusations tomberont aussi.

Mercredi, son avocat, Me Frank Adario, a tenté de démontrer à la juge Julie Riendeau de la Cour du Québec que la police n'avait pas assez d'éléments démontrant que Leonardo Rizzuto était impliqué dans le trafic de drogue pour obtenir un mandat leur permettant de fouiller sa maison. Jeudi, c'était au tour de la Poursuite d'exposer ses arguments.

Un tout

« Pris séparément, les éléments contenus dans l'affidavit ne démontrent pas tout, mais ils doivent être regardés dans leur entièreté. Il y a une grande relation entre Stefano Sollecito (parrain intérimaire de la mafia à l'automne 2015 selon la police) et Leonardo Rizzuto. Il a y a une grande association avec des gens qui sont impliqués dans le trafic de stupéfiants, qui eux-mêmes ont des liens avec d'autres gens impliqués dans le trafic de stupéfiants », a vulgarisé Me Matthew Ferguson.

Le procureur a longuement épluché les paragraphes de l'affidavit au soutien du mandat de perquisition. Il a insisté sur les fréquentations et l'entourage de Leonardo Rizzuto.

Il a notamment souligné le fait qu'à cinq reprises, à la fin de 2014 et en 2015, Leonardo Rizzuto a rencontré Gregory Woolley, un chef de gang impliqué dans le trafic de drogue, et qu'il a également été observé en train de rencontrer Marco Pizzi et Erasmo Crivello, deux individus impliqués dans l'importation et le trafic de drogue selon la police.

Me Ferguson a repris à son compte les informations de la source policière JJ voulant que Leonardo Rizzuto était l'un des « décideurs » du crime organisé traditionnel italien.

Un PGP

Contrairement à ce que Me Adario avançait dans sa plaidoirie, Me Ferguson croit que Leonardo possédait, comme les autres suspects, un appareil PGP (Pretty Good Privacy), c'est-à-dire un téléphone de type BlackBerry dont les fonctions vocales ont été enlevées, sur lequel les criminels s'échangent exclusivement des messages cryptés et qu'ils surnomment « machines ». Les messages passent par des serveurs qui se trouvent à l'extérieur du Canada et seuls les détenteurs de PGP au sein d'un même groupe peuvent s'échanger entre eux.

« Un jour, la conjointe de Stefano Sollecito a appelé la mère de Leonardo Rizzuto pour qu'elle demande à ce dernier de communiquer rapidement avec lui sur sa machine. Cela signifie que M. Rizzuto était aussi en possession d'un PGP ».

« Si vous mettez tout ça dans le contexte d'une organisation, les informations de la source JJ qui dit qu'il est un décideur, que les suspects utilisent des PGP, on commence à voir les liens entre les individus, puis la présence de M. Rizzuto. Tout porte à croire qu'ils sont dans des affaires de trafic de stupéfiants », a conclu le procureur.

Sa collègue, Me Marie-Christine Godbout, terminera la plaidoirie de la Poursuite demain matin. Par la suite, la juge Riendeau prendra la cause en délibéré.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le (514) 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l'adresse postale de La Presse.