Suivi inefficace des chantiers, immeubles municipaux dans un état « critique » sans plan d’entretien, absence d’information sur l’état des véhicules : Saint-Lambert navigue à vue dans la gestion de ses actifs, s’inquiète un récent rapport dévastateur. Même sa mairesse l’avoue : « On est mauvais et il faut qu’on s’améliore. »

« La Ville n’a pas élaboré de politiques, procédures, directives ou orientations afin d’assurer une gestion efficace des actifs », écrit la firme Raymond Chabot Grant Thornton dans un rapport présenté lundi dernier au conseil municipal, à la demande de l’administration de Pascale Mongrain.

Résultat : l’information sur de nombreux bâtiments municipaux n’est « pas complète » et n’a « pas été mise à jour au cours des dernières années », lit-on dans ce document.

Cinq installations majeures de la Ville, soit l’hôtel de ville, le centre multifonctionnel, la maison Desaulniers, les ateliers municipaux et le chalet du club de golf, sont d’ailleurs dans un état « critique » et nécessiteraient des investissements de plus de 10 millions sur cinq ans, à eux seuls. Pourtant, « il n’y a aucun suivi des travaux réalisés et à réaliser », note le rapport.

La firme estime que plus de 4,8 millions devraient être investis seulement dans la prochaine année, dont 4,2 millions en « travaux urgents ». Or, dans les cinq dernières années, Saint-Lambert n’a investi que 3 millions dans ses actifs immobiliers. C’est à peine 5 % de ses investissements en immobilisations.

Le portrait n’est d’ailleurs guère plus reluisant pour son parc de véhicules, dont le suivi « se fait principalement par l’entremise d’un fichier Excel, malgré le fait que la Ville détient un logiciel d’entretien », déplorent les experts de Raymond Chabot Grant Thornton.

Des recommandations sont suggérées, dont le fait de se doter d’une politique en gestion des actifs, mais aussi de créer des mécanismes de contrôle et de surveillance plus « rigoureux ». Les employés devraient également être formés davantage aux technologies d’inventaire disponibles.

« Ça ne va pas bien »

La mairesse de Saint-Lambert, Pascale Mongrain, ne cache pas que la situation est très problématique. « On le sait que ça ne va pas bien, on le sait que la Ville historiquement n’a pas bien géré ses actifs immobiliers ou son matériel roulant. Je vous le dis : on est mauvais et il faut qu’on s’améliore », lâche-t-elle.

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La mairesse de Saint-Lambert, Pascale Mongrain

« On n’est pas du tout surpris par ce rapport. Juste notre hôtel de ville, par exemple, il a subi des dégâts et des intempéries depuis à peu près 20 ans. La Ville n’a rien fait, on a été obligés de la fermer pour la relocaliser dans quatre endroits différents. C’est la preuve que la Ville n’a pas géré ses actifs », ajoute Mme Mongrain, qui estime toutefois que la situation n’est pas unique à Saint-Lambert.

L’élue affirme que son administration songe depuis un moment à vendre « certains actifs ». « On a des enjeux financiers qui ne nous permettent pas d’investir comme on le voudrait pour entretenir nos immeubles. Et la main-d’œuvre, elle n’est pas là pour s’en occuper adéquatement aussi », dit-elle.

Pour les actifs qu’on va conserver, comme l’hôtel de ville ou le centre des loisirs, c’est sûr qu’il faut développer une politique sur la façon de les gérer.

Pascale Mongrain, mairesse de Saint-Lambert

Elle promet de s’y attaquer dans les prochains mois avec son nouveau directeur général, François Pépin.

Quant au matériel roulant, le problème est que la Ville « n’a pas de données cumulées de façon organisée », note la mairesse. « On a un logiciel, mais il n’est pas utilisé adéquatement par les employés, qui sont débordés et qui sont toujours en train d’éteindre des feux. On va les former et s’assurer que ça change. […] Bref, d’ici un an et demi et la fin de mon mandat, on va voir une différence », promet-elle.

Demandes répétées

À Saint-Lambert, des élus, dont le conseiller municipal du district 5 Loïc Blancquaert et la conseillère du district 8 Stéphanie Verreault, demandent depuis un moment à la Ville de se doter d’une stratégie en matière de gestion des actifs. « Ça n’a toujours pas été fait, mais là, tout ça va venir mettre une pression supplémentaire », affirme M. Blancquaert.

Je ne suis pas d’accord avec le fait qu’on se départisse simplement de certains actifs. Au contraire, c’est à nous de nous doter de mécanismes pour qu’on puisse les gérer de façon adéquate. Une ville ne peut pas simplement être locataire. Il faut qu’on mette de l’argent et des ressources.

Loïc Blancquaert, conseiller municipal de Saint-Lambert

La Ville doit, selon lui, comprendre « qu’à long terme, ce sera toujours rentable d’entretenir [ses] actifs de façon continue ». « Ça évite une situation où on doit mettre des sommes énormes soit pour les mettre aux normes, soit pour en construire de nouveaux. »

Cela dit, « un peu tous les paliers de gouvernement ont laissé aller certaines choses » dans les dernières années, rappelle M. Blancquaert. « L’entretien des actifs, ce n’est pas quelque chose de glamour, il n’y a pas de rubans à couper, donc ce n’est jamais dans le sommet des priorités des administrations, qui sont plus souvent en mode réaction. C’est quelque chose qui est facilement oubliable », analyse-t-il.

En savoir plus
  • 70 %
    Proportion des bâtiments de Saint-Lambert qui ont été construits il y a 50 ans et plus, ce qui veut dire que la fin de leur vie utile approche.
    Source : Rapport de Raymond Chabot Grant Thornton