Alors que Québec ne permettra pas aux municipalités de faire un déficit malgré la pandémie, Montréal affirme qu’il sera impossible de faire autrement sans emprunter, face à un manque à gagner important. L’opposition, elle, salue la décision du gouvernement, car l’inverse aurait été un « chèque en blanc ».

« Sans une contribution significative du gouvernement, il sera impossible de boucler les budgets des villes en novembre sans emprunter », indique la porte-parole au cabinet de la mairesse de Montréal, Geneviève Jutras. Cette dernière soutient que l’administration « a fait un effort financier considérable » en réduisant de 123 millions de dollars ses dépenses. « On s’attend à ce que Québec et Ottawa fassent leur part aussi », tranche-t-elle.

En avril, la Ville avait soutenu que ses pertes liées à la COVID-19 oscillaient entre 140 millions et 295 millions. « Au fur et à mesure que la crise a continué, il y a de plus en plus de dépenses en tant que telles. C’est sûr qu’on n’est pas dans la fourchette basse », a indiqué le président du comité exécutif, Benoit Dorais, jeudi.

Hier, la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation, Andrée Laforest, s’était faite claire. « On ne veut pas que les municipalités fassent de déficit », a-t-elle répondu aux élus de l’opposition qui le questionnaient à ce sujet, lors de l’étude des crédits budgétaires. D’ici la fin de l’été, Québec promet toutefois de nouvelles mesures « COVID » pour les villes en situation de déficit, pour éviter que les citoyens ne « ramassent la facture ».

À lui seul, le transport collectif pèse lourd sur les pertes. En juin, Québec annonçait un soutien d’urgence de 400 millions au transport collectif. Quoique bienvenue, l’aide serait toutefois insuffisante, L’Autorité régionale du transport métropolitain (ARTM) s’attend notamment à des pertes de 740 millions.

Trop de dépenses, dit l’opposition

Pour le chef d’Ensemble Montréal, Lionel Perez, la décision de Québec est la bonne dans le contexte actuel. « Le gouvernement est juste de ne pas récompenser une administration beaucoup trop dépensière depuis trois ans. L’inverse aurait été un chèque en blanc », martèle-t-il.

L’élu déplore que la Ville n’ait pas donné « suffisamment d’information » aux citoyens sur les revenus et les dépenses pendant la pandémie. Il juge également que l’administration Plante n’a pas pris les « décisions difficiles » qui s’imposaient.

J'aurais coupé dans les services qui n’allaient pas fournir de toute façon. On aurait pu mettre certains postes sur pause pour soulager les finances.

Lionel Perez, chef de l’opposition officielle

Son parti s’inquiète qu’en empruntant, la Ville « soit en train de taxer les générations futures », d’autant plus qu’une dérogation à la politique de la dette a déjà été demandée. « Ce sont de très mauvaises pratiques », lance M. Perez, pour qui les 123 millions de réductions de dépenses sont « nettement insuffisantes ». « Des semaines plus tard, la Ville veut tirer avantage de la pandémie pour sa mauvaise gestion », rajoute-t-il.

L’UMQ en analyse

Jointe par La Presse, l’Union des municipalités du Québec (UMQ) affirme pour sa part que des « discussions » auront lieu avec Québec dans les prochains jours.

« Nous n’avons pas d’autres commentaires pour le moment », indique son conseiller aux communications, Joël Vaudeville. Il dit vouloir d’abord « prendre connaissance de la position du ministère des Affaires municipales ».

L’UMQ rappelle que l’aide aux municipalités devra aussi faire l’objet d’analyses approfondies. « Nous déposerons une nouvelle évaluation à la fin août. Les besoins se chiffrent à 1,4 milliard juste pour 2020 », souligne M. Vaudeville.