Un projet de remplacement de feux de circulation qui coûte deux fois plus cher pour la moitié du travail. De nouvelles radios onéreuses qui ne répondent pas aux besoins des policiers. Une coûteuse stratégie pour contrer l'agrile du frêne dont la Ville ignore l'efficacité. Dans son premier rapport, la nouvelle vérificatrice générale de Montréal, Michèle Galipeau, relève plusieurs problèmes dans la gestion de projets majeurs de la métropole.

La vérificatrice générale s'est notamment intéressée au programme de remplacement des feux de circulation de la Ville de Montréal. Elle a notamment découvert que le projet avait déjà coûté le double de ce qui était prévu, alors que seulement la moitié du travail a été fait. En 2008, la métropole évaluait qu'il en coûterait 42,4 millions pour refaire les feux à 1400 intersections.

Or, ses vérifications ont déterminé que le projet avait déjà coûté 81,1 millions. Et ce, même si les travaux ont été faits dans seulement 750 intersections. L'audit note d'importants écarts entre les travaux réalisés et les informations fournies aux élus.

Devant les nombreux problèmes, la vérificatrice générale invite la direction de la Ville à faire «un suivi étroit» du chantier pour s'assurer du respect des échéanciers et des coûts.

Des radios problématiques

Le nouveau système de radiocommunication des policiers et pompiers de Montréal (SERAM) a connu d'importants problèmes depuis son lancement. À l'origine, le projet visant à moderniser le système en place depuis 1989 devait coûter 74 millions, mais il a connu plusieurs ratés. Plusieurs pannes «ont mis en évidence une problématique de fiabilité très préoccupante du système».

En janvier 2016, le système utilisé par les policiers et pompiers a été en panne pendant un peu plus de trois heures. Un plan de redressement a été mis en place pour corriger la situation, mais ces correctifs porteront la facture du projet à 129 millions. De plus, ces problèmes ont retardé l'implantation du nouveau système. Plutôt que décembre 2015, celui-ci ne sera pas prêt avant la fin de 2017. Et encore, le rapport souligne plusieurs «enjeux et défis techniques qui demeurent à régler».

La vérificatrice ajoute également que le système dont hériteront le Service de police de la Ville de Montréal et le Service de sécurité incendie de Montréal ne répondra pas à tous les besoins ciblés au départ, la géolocalisation dans les bâtiments et sous terre n'étant pas fonctionnelle. «Ça met en danger nos policiers et pompiers en cas d'une situation d'urgence. On est vulnérables», déplore Valérie Plante, chef de Projet Montréal.

La lutte contre l'agrile du frêne

Après avoir dépensé 30 millions pour lutter contre l'agrile du frêne, Montréal n'est pas en mesure de dire si sa stratégie pour freiner sa propagation est efficace, déplore également la vérificatrice. Dans son rapport, elle se penche sur les efforts pour s'attaquer à cet insecte ravageur détecté en 2011. Si la Ville n'a pas ménagé les efforts depuis, la vérificatrice constate qu'il est difficile de déterminer si «la stratégie déployée par la Ville fonctionne efficacement».

Et alors que la Ville doit traiter certains arbres tous les deux ans pour les préserver, elle constate des lacunes dans le suivi, si bien que les efforts pourraient avoir été vains. La vérificatrice note un «risque que l'insecte se propage et qu'une forte proportion des frênes initialement traités lors d'une première tournée soient à abattre et à remplacer plus rapidement».

«C'est inquiétant, on sent que l'administration avance à l'aveuglette. On n'est pas en contrôle de la situation», s'indigne Valérie Plante.

Dossier transmis à l'inspecteur général

La vérificatrice générale révèle également dans son rapport avoir transmis un dossier au Bureau de l'inspecteur général devant ses doutes sur l'attribution des contrats de gestion des écocentres et de transport des matières recyclées. Son audit a relevé plusieurs manquements quant à la transparence des appels d'offres, estimant que le processus pourrait être «entaché».

Afin d'y voir plus clair, elle a ainsi jugé bon de transmettre le dossier au bureau de Me Denis Galant «afin qu'il puisse poursuivre les investigations». La VG invite par ailleurs les arrondissements à resserrer leurs mesures pour démontrer comment leurs subventions contribuent à atteindre les objectifs verts de la Ville.

Problème de relève au VG

La nouvelle vérificatrice générale note un problème de relève au sein de son propre bureau. Son rapport souligne en effet que 20% de son personnel est admissible à une retraite, dont deux des quatre membres de la direction. Mais son équipe peine à recruter. Plusieurs postes sont vacants depuis plusieurs années, et aucun candidat ne se manifeste.

«Ce n'est pas un bon signe. On doit se demander pourquoi on n'arrive pas à combler ces postes», a déploré Valérie Plante. Elle accuse l'administration Coderre d'avoir instauré un mauvais climat de travail à la Ville de Montréal.