René Young est catégorique: ni lui ni sa femme n'ont signé l'acte de candidature de Ruth Ellen Brosseau, la nouvelle députée néo-démocrate de Berthier-Maskinongé. Pourtant, leurs noms figurent en toutes lettres sur la liste des 100 signatures requises pour se lancer dans la course électorale.

«Dans le cas de ma femme, c'est l'évidence même: il y a une faute dans son nom écrit en lettres moulées, et ce n'est pas du tout sa signature. Ce n'est même pas lisible», soutient l'enseignant à la retraite de Trois-Rivières-Ouest.

M. Young admet que, dans son cas, la signature est plus ressemblante. Mais il croit avoir été victime d'une usurpation. Il y a quelques semaines, on lui a fait signer un document qui n'avait rien à voir avec les élections. «J'imagine que c'est là que ça s'est joué», dit-il.

D'autres électeurs, joints par des militants libéraux de la circonscription, pensaient avoir signé une pétition, et non un acte de candidature.

Quant aux conservateurs, ils ont confirmé hier que leur candidate Marie-Claude Godue avait porté plainte à Élections Canada et réclamé l'annulation du scrutin.

Élections Canada fera enquête sur ces allégations. Pour avoir le droit de faire campagne, un candidat doit obtenir les signatures d'au moins 100 électeurs de la circonscription.

«Impensable, irréaliste»

Cette affaire embarrasse une fois de plus Ruth Ellen Brosseau, gérante adjointe d'un bar d'Ottawa qui a fait les manchettes pour avoir pris une semaine de vacances à Las Vegas en fin de campagne. La jeune mère célibataire, qui parle très peu le français, a été la première surprise par son élection dans Berthier-Maskinongé. Thomas Mulcair, le lieutenant de Jack Layton au Québec, a déclaré mardi qu'il assumerait la responsabilité de la circonscription.

Mme Brosseau sera très encadrée par le NPD afin de mener à bien sa tâche de députée. Elle n'a pas l'intention de se retirer.

L'affaire des signatures soulève toutefois des questions sur la validité de sa candidature. M. Mulcair s'est montré très sceptique, hier, sur les ondes de Radio-Canada. «C'est un truc impensable, irréaliste, ça n'a jamais eu lieu, a-t-il dit. C'est absurde, c'est une fausse nouvelle.»

«Les signatures ont été récoltées dans les règles de l'art par des travailleurs de campagne qui ont fait du porte-à-porte, assure Karl Bélanger, porte-parole du NPD. S'il y a des gens qui ne se souviennent pas d'avoir signé cela, on n'y peut rien, mais on ne commencera pas à inventer des signatures.»

Convaincu du contraire, René Young se dit «découragé» par l'expérience. «C'est à nous de choisir d'appuyer un candidat ou non. Cela me laisse amer face à la politique. Déjà que ma confiance envers les politiciens n'était pas élevée... ce sera maintenant encore plus difficile.»