Une coalition d’agriculteurs et de groupes environnementaux s’érige en gardien des terres agricoles, au moment où le gouvernement du Québec mène une grande consultation pour moderniser la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles.

Équiterre, la Fédération de la relève agricole du Québec (FRAQ), la Coopérative pour l’agriculture de proximité écologique (CAPE), Protec-Terre et Vivre en Ville ont lancé lundi l’alliance SaluTERRE. Le but ? Protéger les terres agricoles contre les « nombreuses menaces » qui mettent « en danger » notre garde-manger.

« Nos terres cultivables disparaissent sous le béton au nom du développement industriel, routier et de l’étalement urbain. Une usine de batteries par-ci, un nouveau quartier par-là, un parc industriel là-bas, un stationnement ici, pourquoi pas ? », a déclaré Colleen Thorpe, directrice générale d’Équiterre.

SaluTERRE veut aussi porter la voix de la population. Un sondage Léger commandé par Équiterre indique que 74 % de la population juge « extrêmement » (44 %) ou « assez » (30 %) urgent de protéger les terres agricoles convoitées pour le développement résidentiel et industriel.

Ce développement aurait amputé la zone agricole de 57 000 hectares depuis 1998, ce qui équivaut à 40 patinoires de hockey par jour, a calculé SaluTERRE.

Le coup de sonde de Léger, réalisé auprès de 1006 répondants, révèle que 69 % d’entre eux estiment qu’il faut freiner l’étalement urbain en favorisant la construction dans les zones déjà habitées.

« Bref, au Québec, on comprend l’enjeu et on saisit l’urgence de la situation. Maintenant, il faut de l’action », a souligné Mme Thorpe.

Consultation

Fin juin, le ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec, André Lamontagne, a annoncé la mise en place d’une consultation d’une durée de près d’un an en vue de moderniser la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles, adoptée il y a 45 ans.

L’objectif de ce vaste chantier est de mieux protéger les terres dotées du plus grand potentiel agricole des pressions de l’urbanisation. Au Québec, les terres les plus fertiles – et convoitées – se trouvent dans les basses-terres du Saint-Laurent, là où vit la majorité de la population.

En revanche, une réflexion sera menée pour déterminer s’il faut permettre certains assouplissements dans les cas où les terres ont un faible potentiel agricole.

« On nous présente des terres de plus grande valeur et des terres de moins grande valeur », explique Mme Thorpe au sujet des consultations qui ont débuté à l’automne.

« Oui, on s’inquiète de ce phénomène de dire qu’on va préserver certains types de terres peut-être dans le sud du Québec où on estime qu’il y a une grande valeur, alors que d’autres terres plus éloignées pourront peut-être être sacrifiées au développement. Ce n’est pas clair à ce stade-ci, mais c’est ce qu’on lit un peu entre les lignes. »

« Il n’y a pas de mauvaises terres et il n’y a pas de bonnes terres en agriculture. En Abitibi, il peut y avoir de la production bovine sur des terres où il ne se fait pas autre chose, mais c’est de la production agricole quand même », a ajouté Julie Bissonnette, présidente de la Fédération de la relève agricole du Québec.

Le sondage a aussi révélé que 87 % des gens pensent qu’il faut offrir des mesures de soutien financier pour assurer un accès à la terre pour la relève agricole.

« Au Québec, la valeur des terres agricoles est 10 fois plus élevée depuis 25 ans. Étant donné que les terres agricoles cultivées au Québec représentent moins de 2 % du territoire, la demande est plus élevée que jamais. C’est le Far West dans le marché des terres agricoles, où les grands perdants sont la relève », a ajouté Mme Bissonnette.

Avec La Presse Canadienne