Des centaines de personnes ont défilé vendredi dans les rues de Montréal pour témoigner de leur solidarité envers les personnes vivant en situation d’itinérance à l’occasion de la 34édition de la Nuit des sans-abri.

À l’invitation d’organismes de la métropole, les manifestants s’étaient donné rendez-vous au Square Phillips, rue Sainte-Catherine, et ont marché jusqu’à la place Émilie-Gamelin portés par le son des percussions afro-brésiliennes de l’école Zuruba.

De nombreux organismes œuvrant dans le milieu communautaire étaient présents pour exiger des décideurs qu’ils prennent la situation à bras-le-corps. « Il manque de ressources et la population itinérante est en hausse », a fait remarquer Jerry Nadon, intervenant psychosocial à l’organisme PAS de la rue. « Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les fonds ne suffisent pas. » Ce pour quoi, croit-il, « on a besoin de cette nuit plus que jamais ».

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Thérapeute à la Maison Marguerite, qui a pour mission d’accueillir des femmes en situation de précarité, Christie Thompson abonde elle aussi dans ce sens. « C’est de plus en plus important [d’être ici] dans le contexte d’une situation qui ne s’améliore pas. »

S’adressant à la foule à mi-parcours, Marie-José Corriveau, coordonnatrice du Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), a montré du doigt le coût prohibitif des logements. « Les loyers explosent. Les locataires à faible et à modeste revenu sont chassés de leurs logements, qui sont transformés [notamment] en condos », a-t-elle déploré.

Dans la foulée, elle a interpellé le ministre responsables des Services sociaux, Lionel Carmant, présent sur place : « On aimerait que vous portiez le message à [la ministre responsable de l’Habitation, France-Élaine] Duranceau, au [ministre des Finances] Eric Girard et à François Legault. »

Enjeu tentaculaire

Manon Massé, co-porte-parole de Québec solidaire, était de la marche. « On a de nos concitoyens qui vivent dans la rue, et je crois que c’est important de leur dire : “Je reconnais que vous êtes des citoyens à part entière et que l’État doit en faire plus pour vous aider.” »

Elle a de plus estimé que la crise de l’itinérance à laquelle fait face le Québec – le nombre de sans-abri a bondi de 44 % ces dernières années, selon le plus récent dénombrement – avait de nombreux visages. « La crise de l’itinérance, c’est la crise du coût de la vie et la crise du logement, auxquelles s’ajoute une crise des opioïdes, a-t-elle constaté. C’est là-dessus qu’il faut agir. »

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Interrogé par La Presse, le ministre fédéral de l’Environnement et du Changement climatique, Steven Guilbeault, a réitéré l’engagement du gouvernement canadien à soutenir les personnes en situation d’itinérance à la lumière notamment de l’annonce récente d’un investissement de 900 millions pour accélérer la construction de logements sociaux. Une somme totale de 1,8 milliard (Québec ayant également débloqué 900 millions) qui demeure toutefois insuffisante, selon Mme Corriveau, du FRAPRU.

« Sur les questions comme l’itinérance, on peut toujours faire mieux », a reconnu M. Guilbeault.

Lisez l’article « L’itinérance a bondi de 44 % en cinq ans au Québec »

En soirée ont eu lieu des activités de sensibilisation à la réalité des personnes en situation d’itinérance, dont des discussions portant sur la prévention de l’itinérance jeunesse et le travail du sexe.

À l’échelle du Québec, pas moins d’une cinquantaine de villes ont participé vendredi à la Nuit des sans-abri, dans un contexte où l’itinérance tend à se régionaliser, selon les conclusions du dénombrement.