(Ottawa) L’interdiction permanente de mettre les pieds au Canada pour environ 10 000 des plus hauts dirigeants du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) et du régime iranien a été décrétée.

Le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, a indiqué lundi en début d’après-midi que les « autorités ont donné la capacité » à l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) de mettre en application cette mesure annoncée le mois dernier.

Au moment du point de presse virtuel de M. Mendicino, qui était accompagné de son collègue à l’Immigration, Sean Fraser, l’ASFC et des « partenaires » en matière de sécurité publique devaient recevoir incessamment des avis sur le mot d’ordre donné.

« C’est maintenant une autorité qui est en (vigueur) et on va travailler ensemble avec l’ASFC pour donner tous les conseils à nos agents sur la première ligne », a dit le ministre de la Sécurité publique en français. Il a précisé, en anglais, que la mesure prendrait effet « dans les prochains jours », puis « aussitôt que possible ».

« Je m’attendrais à ce qu’ils aient en main cet avis dans les heures, aujourd’hui et au plus tard demain », a ajouté M. Mendicino, mentionnant un investissement de 76 millions récemment mis de l’avant dans le but d’aider les organisations chargées d’assurer le respect des lois.

Il a souligné que l’interdiction d’accès ne s’applique pas seulement à des membres du CGRI, mais aussi à des ministres, des ambassadeurs et des membres du système de justice, entre autres catégories établies.

L’interdiction d’accès au pays est implantée par la désignation du régime iranien en vertu de la disposition la plus rigoureuse de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.

« C’est un outil vraiment puissant (qui) n’a été utilisé qu’à neuf occasions antérieures », a affirmé le ministre de la Sécurité publique.

Le premier ministre Justin Trudeau avait signalé l’intention d’emprunter cette avenue en octobre dernier. Il avait noté que cette mesure est utilisée seulement dans « les circonstances les plus graves contre des régimes ayant perpétré des crimes de guerre et des génocides, comme en Bosnie et au Rwanda ».

Lundi, M. Fraser a aussi insisté sur le fait que les 10 000 personnes visées pourraient être plus nombreuses puisqu’il ne s’agit que d’une estimation en fonction de catégories d’individus spécifiées.

« Si le nombre est plus vaste que 10 000 en raison de ces définitions alors qu’il en soit ainsi, a-t-il dit en anglais. Nous nous concentrons sur ceux qui sont complices des activités du régime, qui sont évidemment liés à de flagrantes violations des droits de la personne. »

La désignation faite lundi n’a pas pour effet d’ajouter le CGRI à la liste des entités terroristes qui implique des sanctions sévères en vertu du Code criminel.

Questionné à savoir si un tel ajout, réclamé par plusieurs comme l’opposition officielle conservatrice aux Communes, est envisagé, M. Fraser a répondu ne pas vouloir « envoyer de signal » sur des décisions d’autres ministres.

« Mais, de ma perspective, (ce qui a été annoncé aujourd’hui) était le bon outil à ce moment-ci et cela atteint l’objectif que j’ai entendu haut et fort de la part de la communauté canado-iranienne sur ce qu’ils voulaient voir du gouvernement fédéral. »

Il a laissé entendre qu’une désignation en vertu du Code criminel pourrait faire en sorte que certaines personnes seraient sanctionnées à tort, mentionnant qu’elles pourraient « ne pas être complices par le fait qu’elles ont été enrôlées et ont subséquemment déserté le CGRI ».

M. Fraser a dit faire écho à des commentaires précédemment tenus par le ministre de la Justice, David Lametti. Ce dernier n’était pas présent au point de presse de lundi.

En 2018, la Chambre des communes avait adopté une motion afin que le Corps des gardiens de la révolution islamique soit officiellement désigné comme groupe terroriste. L’actuelle liste inclut une division du CGRI, soit la brigade al-Qods.

La mort de Mahsa Amini, une femme iranienne de 22 ans qui a perdu la vie alors qu’elle était détenue parce qu’elle n’aurait pas bien couvert ses cheveux, a provoqué un mouvement de contestation en Iran qui s’est amorcé cet automne. Téhéran a depuis réprimé les dissidents au régime.

Indépendamment de la désignation en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, le Canada a bonifié son régime de sanctions contre l’Iran depuis la fin septembre. À ce jour, 52 individus et 18 entités y sont listés, selon le compte de l’ASFC.