La pluie des dernières heures sur l’Australie a beau donner de l’espoir, l’un des pompiers forestiers québécois qui s’apprêtent à s’y rendre pour prêter main-forte s’attend à devoir affronter des incendies imprévisibles, avec un sol extrêmement sec et des rafales menaçant de reprendre de plus belle. « À tout moment », a confié Alexandre Monette, originaire de la région de Chibougamau, lors d’une entrevue avec La Presse.

Avec une vingtaine d’autres pompiers forestiers du Québec, il s’envole dimanche matin pour Vancouver, point de ralliement de plus de 140 pompiers du pays et des États-Unis. Les pompiers atterriront ensuite à Melbourne, capitale de l’État de Victoria, dans le sud-est du pays, avant d’y être déployés.

PHOTO FOURNIE PAR ALEXANDRE MONETTE

Alexandre Monette

« Je suis en contact étroit avec des pompiers australiens avec qui j’ai déjà travaillé en Alberta, en 2017. On me dit que la pluie n’aidera en rien. Les combustibles sont 100 % secs. Concrètement, ça veut dire que les souches d’arbres sont sèches, qu’il n’y a pas d’humus [couche supérieure du sol]. Dans les régions frappées, le sol est carrément mort. »

C’est la première fois que des pompiers québécois sont appelés à combattre des incendies à l’extérieur du Canada, confirme la Société de protection des forêts contre le feu (Sopfeu).

« Le rêve de tout pompier. Je suis chanceux », estime Alexandre Monette, pompier depuis 2013. Loin de se destiner à combattre les incendies, l’homme de 39 ans est titulaire d’un baccalauréat en enseignement. L’hiver, il enseigne les mathématiques aux cours aux adultes, et l’été, il va aux feux.

PHOTO FOURNIE PAR ALEXANDRE MONETTE

Alexandre Monette et et une vingtaine de pompiers forestiers du Québec s’envoleront dimanche matin pour Vancouver, point de ralliement de plus de 140 pompiers du pays et des États-Unis.

Ceux qui, comme lui, ont été choisis pour l’Australie ont de l’ancienneté, ils ont dû se soumettre à des tests physiques, à un test d’anglais, en plus d’être titulaires d’un permis de conduire international et d’un passeport en règle. Alexandre Monette explique que tout s’est joué rapidement. Le lundi, il était en classe, le vendredi matin il passait un test physique à Québec, puis il était sélectionné.

« Disons que j’étais nerveux après les excès du temps des Fêtes », lance-t-il en riant.

Du jamais vu

Pour bagage, le pompier Monette a droit à 65 lb, équipement de camping compris. « L’habituel, la routine », explique-t-il. Sauf, que cette fois, il a ajouté un masque pour se protéger des particules fines.

« La fumée est très intense. C’est du jamais vu », dit-il.

Les pompiers du Québec qui l’accompagneront proviennent entre autres de Chibougamau, Roberval, Val-d’Or, Matagami, Maniwaki et La Tuque. Une fois en Australie, ils sauront plus précisément comment ils seront déployés sur le terrain. Il est question de rondes de travail de 14 jours, suivies de 2 jours de congé, et ainsi de suite.

Alexandre Monette explique également qu’ils sont prêts à devoir travailler différemment, sans l’abondance d’eau pour « taper les feux », explique-t-il.

« Il est fort probable qu’on doive procéder à du brûlage dirigé. Ça veut dire qu’il faudra sacrifier certaines portions de forêt pour en sauver d’autres. Il y a plusieurs inconnues. Il y a le risque de se buter à la mortalité, à celle dans les communautés, la faune, les animaux. On s’attend à tout, même à devoir creuser des tranchées. »

Février et mars sont considérés comme les mois les plus chauds en Australie.

Des dons

Comme si l’effort de combattre les incendies n’était pas suffisant, Alexandre Monette et l’un de ses collègues, Gabriel Cloutier, ont décidé d’organiser une collecte de fonds ces derniers jours. Leur objectif : remettre directement l’argent sur le terrain, sans passer par des organismes d’aide. 

« On va fort probablement croiser des communautés autochtones, des gens dans le besoin, en détresse. Il y a aussi les animaux, les soins à prodiguer. Nous voulons faire notre part en redonnant directement les dons, à proximité des feux. »

Des incendies ravageurs

Au moins 28 personnes, dont un pompier, sont mortes depuis le début des incendies dévastateurs. Jusqu’à 1 milliard d’animaux pourraient avoir péri, et certaines espèces seraient désormais en danger de disparition, selon les différents bilans des autorités locales. Plus de 2000 habitations ont été détruites, dans une zone de cinq millions d’hectares partis en fumée, soit l’équivalent de la superficie du Costa Rica.