(Ottawa) Le gouvernement fédéral compte modifier certaines façons de faire cette année pour empêcher des déchets du Canada de se retrouver illégalement sur des côtes étrangères, après avoir dû rapatrier des dizaines de conteneurs d’ordures pourries qui avaient été envoyés dans au moins deux pays asiatiques l’an dernier.

Le Canada a dépensé 1,14 million en juin 2019 pour acheminer 69 conteneurs remplis de déchets vers une installation de valorisation énergétique près de Vancouver, mettant ainsi fin à une querelle diplomatique de six ans avec les Philippines.

Les déchets canadiens ont été illégalement expédiés vers ce pays d’Asie du Sud-Est en 2013 et 2014 – faussement étiquetés comme des plastiques à recycler – et les deux pays se sont battus pendant des années pour déterminer qui devait s’en débarrasser.

Le différend n’a pris fin que lorsque Rodrigo Duterte, président des Philippines, a suspendu ses relations diplomatiques et a rappelé son ambassadeur d’Ottawa jusqu’à ce que le Canada rapatrie enfin ses ordures.

Aussi, Environnement Canada affirme qu’une poignée de conteneurs ont été retournés au Canada depuis la Malaisie au cours des derniers mois.

Le premier ministre malaisien Mahathir Mohamad a déclaré en mai dernier qu’il était « extrêmement injuste » pour des pays comme le Canada de décharger leurs déchets dans d’autres pays et son gouvernement a exprimé l’espoir que le Canada prendrait des mesures pour mieux surveiller et suivre ses cargaisons.

Les conteneurs qui ont abouti en Malaisie étaient étiquetés comme recyclables, mais étaient tellement contaminés que les matériaux ne pouvaient pas être recyclés.

Ce fut également le cas pour les cargaisons qui se sont rendues aux Philippines.

Les responsables canadiens semblent faire écho à l’appel lancé par le premier ministre malaisien.

Environnement Canada dit qu’il travaille maintenant avec l’Agence des services frontaliers du Canada pour voir ce qui peut être fait pour arrêter les expéditions illégales de déchets.

L’objectif est de mettre en place de nouvelles politiques et de nouveaux programmes avant la fin de l’année.

Kathleen Ruff, fondatrice de la campagne de défense des droits en ligne RightonCanada.ca, estime qu’il faut se réjouir si le Canada tente de mettre fin aux expéditions illégales. Toutefois, a-t-elle souligné, le Canada reste opposé à la modification de la Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination, y compris les déchets et les matières recyclables.

La Convention de Bâle permettait aux pays développés comme le Canada d’expédier des déchets vers des pays en développement tant qu’ils obtenaient un consentement préalable et éclairé. Mme Ruff a déclaré que ce système ouvrait la porte à des abus et qu’il n’avait pas été suffisant « pour arrêter le déversement massif de déchets dangereux dans les pays en développement ».

La convention a été modifiée en décembre pour interdire l’exportation de déchets dangereux avec ou sans consentement.

Le Canada n’a pas accepté cet amendement, a souligné Mme Ruff.

À la suite du fiasco des déchets aux Philippines, le Canada a modifié ses politiques afin d’exiger des permis pour expédier la plupart des déchets à l’étranger.

Pourtant, des déchets canadiens se retrouvent régulièrement dans des ports étrangers, même si aucun permis n’a été délivré au cours des quatre dernières années.

En plus des Philippines et de la Malaisie, les déchets canadiens ont fait surface au Cambodge et en Indonésie au cours de la dernière année.

Environnement Canada n’a pas encore précisé qui a payé pour le rapatriement des déchets de la Malaisie, combien de conteneurs il y avait ou où ces déchets se sont retrouvés.

Le problème des déchets illégaux a explosé après que la Chine a fermé ses portes à la plupart des matières plastiques recyclables en 2018. La Chine était depuis longtemps la principale destination des plastiques recyclables dans le monde, mais une grande partie du matériel arrivait contaminé par des matières non recyclables. La Chine en a eu assez et a mis fin à toutes ces activités.

Un certain nombre d’itinéraires illégaux pour les déchets ont été créés alors que les pays développés ayant une capacité limitée à recycler leurs propres déchets recherchaient de nouveaux marchés qui n’existaient pas vraiment. Dans certains cas, les pays expédiaient des déchets à des importateurs sans scrupule qui promettaient de les recycler, mais au lieu de cela, ils déversaient simplement les matières dans les cours d’eau ou les brûlaient, provoquant une pollution importante de l’air et de l’eau.

Gabrielle Lamontagne, porte-parole d’Environnement Canada, a déclaré que le ministère continue de recueillir des informations sur les déchets illégaux. Elle n’a pas fourni plus d’informations sur la quantité de déchets illégaux dont le ministère a connaissance et où ils se sont retrouvés.