La Sûreté du Québec (SQ) enquête sur la mort d'une femme récemment expulsée de son logement dans la première vague d'évictions à toucher le Grand Nord québécois depuis deux ans.

La mort de Charlotte Papak, une Inuite de 55 ans dont le corps a été retrouvé vendredi dernier à Kuujjuaq, à l'extérieur, est pour l'instant considérée comme suspecte.

«C'est si soudain. Je ne sais plus ce que je dois ressentir. Je relis les conversations que nous avons eues ensemble. [...] J'aurais aimé que quelqu'un me parle de ses difficultés», a déclaré Caroline Boulianne, fille de Mme Papak.

Mme Boulianne ne vit pas à Kuujjuaq. La surdité de Mme Papak rendait les communications difficiles, a indiqué sa fille.

Selon nos informations, les premiers indices recueillis sur place mènent vers la thèse du suicide. Elle était considérée comme «itinérante» par les autorités.

Comme 31 autres locataires ou familles de locataires du Nunavik, Mme Papak a été évincée de son logement au début du mois de novembre en raison d'importants retards de paiement accumulés. Selon une décision de la Régie du logement, elle devait près de 50 000 $.

«On doit payer le loyer»

Dans la région, la quasi-totalité de la population réside dans des logements sociaux : les coûts de transport et de main-d'oeuvre rendent la construction de maisons privées extrêmement onéreuse.

Ces logements sociaux sont gérés par l'Office municipal d'habitation Kativik (OMHK).

Le conseil d'administration de l'organisme a suspendu toute éviction pour l'année 2017, afin de réfléchir au problème du non-paiement des loyers.

Après une campagne de sensibilisation pour laquelle trois employés de l'Office se sont déplacés dans toutes les communautés du Nunavik, l'organisation a décidé de reprendre les évictions en 2018. Pour la première fois en cinq ans, elle s'est adressée l'été dernier à la Régie du logement afin d'obtenir des centaines de jugements d'expulsion et a décidé d'en appliquer quelques-uns cet automne.

«Ce n'est pas un processus intéressant pour quiconque, mais le message doit passer : on doit payer le loyer», avait expliqué Marie-France Brisson, directrice générale de l'OMHK, à la fin d'octobre. Elle a reconnu que ces expulsions pouvaient avoir un «impact social, [un] impact familial» sur les familles concernées, mais a souligné à plusieurs reprises que si un foyer prenait une entente de paiement, la menace d'expulsion disparaîtrait.

Mme Brisson avait aussi reconnu que le mois de novembre était une période tardive pour procéder à des évictions dans le Grand Nord, mais que des contraintes de temps avaient empêché l'Office d'agir plus rapidement.

Depuis le début de l'année, le Nunavik traverse une grave crise du suicide qui met les autorités de la santé et de l'éducation en alerte. Seulement dans le village de Puvirnituq, qui compte 1800 habitants, au moins une dizaine de personnes se sont donné la mort depuis janvier.

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DES LIGNES D'AIDE

Si vous avez besoin de soutien ou avez des idées suicidaires, vous pouvez appeler un des numéros sans frais suivants pour parler à quelqu'un.

Ligne d'aide Kamatsiaqtut :  1 800 265-3333 (inuktitut, anglais)

Ligne de crise des Pensionnats autochtones :  1 866 925-4419 (inuktitut, anglais, français)

Jeunesse, J'écoute : 1 800 668-6868 ou texte 686 868 (anglais, français)

Ligne 1 866 APPELLE au Québec (français)

Ligne d'écoute d'espoir pour le mieux-être des Premières Nations et des Inuits : 1 855 242-3310