Le chroniqueur Patrick Lagacé et La Presse ont reçu hier le prestigieux Prix de la liberté de la presse pour leur contribution au débat public sur la protection des sources journalistiques et la surveillance des journalistes par les forces policières. Ce 19e prix remis par le Comité canadien pour la liberté de la presse mondiale est partagé avec des journalistes de CBC Saskatchewan.

L'éditeur adjoint et vice-président à l'information de La Presse Éric Trottier se réjouit que le Comité ait récompensé le travail acharné de Patrick Lagacé et de La Presse pour dénoncer l'espionnage des journalistes par les corps policiers. « Ce prix nous fait particulièrement plaisir cette année, parce qu'il a une signification profonde pour ce qu'est notre métier », soutient-il.

Modeste, Patrick Lagacé maintient que ce prix « récompense le travail des journalistes québécois qui ont beaucoup dérangé la police dans les dernières années ». Le chroniqueur soutient que l'espionnage policier dont il a été victime « incarne les autres histoires d'espionnage » qui ont suivi la sienne dans la foulée des révélations de La Presse, en octobre dernier.

« L'histoire a frappé l'imaginaire. Oui, c'est la police qui espionne un journaliste, mais de façon extrêmement intrusive et inusitée. Aussi inquiété et insulté comme journaliste puis-je avoir été, j'ai décidé de saisir l'occasion pour parler de journalisme. J'ai parlé sur des dizaines de tribunes de l'importance du journalisme, des sources, et de protéger légalement la relation privilégiée entre les journalistes et leurs sources », explique le chroniqueur.

Selon Éric Trottier, ce prix est aussi « un message au gouvernement [Trudeau] pour l'encourager » à adopter le projet de loi S-231 sur la protection des sources journalistiques du sénateur Claude Carignan ou tout autre projet de loi semblable qui renforcerait la protection des sources. « C'est pour ça qu'on le trouve particulièrement important, ce prix », dit M. Trottier, qui rappelle qu'une quarantaine de pays ont déjà adopté pareilles lois pour protéger les sources journalistiques.

La Presse a révélé l'automne dernier que le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) avait obtenu des mandats de surveillance à l'égard du chroniqueur Patrick Lagacé dans le but de découvrir l'identité de ses sources. Les affaires internes du SPVM cherchaient à coincer un policier soupçonné de fabrication de preuves.

Ce coup de tonnerre a permis d'apprendre que d'autres journalistes avaient été espionnés par la Sûreté du Québec. Dans la foulée des révélations de La Presse et des autres médias, le gouvernement Couillard a mis sur pied la Commission d'enquête sur la protection de la confidentialité des sources journalistiques.

D'AUTRES JOURNALISTES RÉCOMPENSÉS

Une équipe d'enquête de CBC Saskatchewan formée de Geoff Leo et de Paul Dornstauder a également reçu le 19e Prix de la liberté de la presse pour une série de reportages sur des transactions immobilières controversées près de Regina qui ont coûté des millions de dollars aux contribuables. « En dépit des obstacles, dont l'opposition du gouvernement, les poursuites et les retards à répondre aux demandes d'accès à l'information, CBC continue de publier des articles sur le scandale immobilier », indique le communiqué du Comité canadien pour la liberté de la presse mondiale.

Le journaliste Jim Bronskill, de La Presse canadienne, a reçu le prix Spencer Moore pour sa contribution à la liberté de la presse et à l'accès à l'information, alors que Mary E. Lurvey a reçu le prix du 17e Concours international de dessin éditorial.