Des suites d'une complication postopératoire, Jean-Pierre Cloutier est décédé le 18 juillet dernier à l'hôpital.

Des suites d'une complication postopératoire, Jean-Pierre Cloutier est décédé le 18 juillet dernier à l'hôpital.

C'est une perte immense pour la communauté. Jean-Pierre a été de tous les combats de la cause franco-ontarienne, des conseils scolaires, des collèges communautaires, de l'hôpital Montfort, des centres culturels et du patrimoine franco-ontarien. Concernant l'obtention des fameux collèges communautaires, je le revois scander "pas un, pas deux, mais trois !"

Cet homme qui venait de Fournier, un petit village isolé de l'Est ontarien, avait commencé sa vie comme potier. Mais quel potier !

Il insufflait la vie à ce qui n'était qu'une matière morte. Doué d'une intelligence hors du commun, Jean-Pierre s'est alors investi dans des activités militantes. Il a travaillé pour l'ACFO (Association canadienne-française de l'Ontario) et pour l'ACCO (Assemblée des centres culturels de l'Ontario), dont il fut le directeur général. De tout ce qu'il a fait à l'ACCO, l'un de ses plus beaux projets est d'avoir monté dans les écoles et la communauté un guide sur la culture, le tourisme et le Patrimoine franco-ontariens, en coproduction avec le ROPFO (Regroupement des organismes du patrimoine franco-ontarien). Ce projet connut un succès phénoménal et permit de faire comprendre à tant de jeunes Franco-Ontariens qu'ils avaient une culture bien vivante et profonde.

Dans la fin des années quatre-vingt, Jean-Pierre Cloutier s'exila à Toronto. Il venait d'être engagé par le ministère de la Culture et des Communications de l'Ontario pour faire une recherche et rédiger ce qui allait devenir le rapport Cloutier, dont le véritable titre est Le secteur des industries culturelles de langue française en Ontario, qui fut publié en 1990. Ce rapport est l'un des meilleurs que le gouvernement de l'Ontario ait produit sur la situation culturelle des Franco-Ontariens. Ce rapport fut un livre de référence pour nous tous et nous l'avons allégrement pillé avec la bénédiction de Jean-Pierre.

Il y a quelques années, Jean-Pierre Cloutier s'est impliqué corps et âme dans la Direction de l'Entente Canada Communauté (DECCO), qui était un organisme de positionnement stratégique dont l'un des rôles était de négocier avec le ministère du Patrimoine canadien au nom de la collectivité franco-ontarienne. Jean-Pierre siégea sur cette "table" comme porte-parole du secteur des centres culturels. Tout le monde vous dira qu'il fut l'un des esprits les plus exigeants, les mieux renseignés de cette Table, dont il défendit la cause, sans escales, à bout de bras. Cela rongea sa santé mais n'entama jamais son humanisme et son sens du dialogue.

Parlant de dialogue, rencontrer Jean-Pierre Cloutier, c'était une fête pour l'esprit et le corps. Cet homme était tellement distingué, si raffiné et cultivé, mais aussi si passionné. Il me donnait l'impression qu'il vivait en se lançant dans l'aventure comme s'il avait à jouer physiquement sa vie dans chacune de ses actions. Il détestait l'uniformisation et cherchait à vous convaincre du bien-fondé de sa pensée. Jean-Pierre était peint aux couleurs franco-ontariennes. Quelle joie d'avoir côtoyé cet homme qui nous a livré toute sa vie tout autant une esthétique qu'une véritable éthique de l'exception !

Dans la course à relais et à obstacles qui balise notre quotidien, nous sommes tous les porteurs de ce "témoin" que tu nous passes Jean-Pierre. Le "voleur de feu" que tu es ne s'éteindra jamais.

Jean Malavoy,

directeur général

Association des auteures et auteurs de l'Ontario français (AAOF)