Au pied de la citadelle, dans le dernier bastion musulman d'Andalousie et désormais grand rendez-vous étudiant, les cultures maure, juive et chrétienne façonnent encore l'âme de Grenade.

Avant de commencer sa visite: Petit aperçu historique 

Grenade est une ville unique en son genre. Et c'est pourquoi elle mérite d'être visitée. Dans la langue, la gastronomie, l'architecture, la décoration et la musique, on perçoit partout ici les cinq siècles d'occupation arabe qui ont marqué l'histoire de l'Espagne. C'est au VIIIe siècle que les premiers Berbères conquirent le sud de l'Espagne. À partir du XIe siècle, l'Andalousie vit déferler une arrivée massive d'Arabes. Elle devint en Europe le centre de la civilisation musulmane et arabe, dont Grenade fut un brillant foyer de la culture islamique. Au XIIIe siècle, les chrétiens espagnols reprirent les califats de Cordoue, Jaén, Séville, Jerez et Cadix (1250). Seul subsista le royaume de Grenade qui connut pendant deux siècles son âge d'or.

Une journée auprès des sultans: Visite de l'Alhambra 

Majestueuse, l'Alhambra, de son vrai nom al-Hamra, «la Rouge» en raison de la teinte que prennent ses pierres au soleil couchant, domine la ville: palais, fontaines, jardins fleuris de lauriers, de roses et d'espèces anciennes, et son Generalife, résidence d'été des sultans ont été créés à partir de 1238. Au-delà de la pierre ocre ciselée de ses remparts s'élève à l'horizon le plus haut massif espagnol, la Sierra Nevada (3478 m). Il est doux d'y revenir la nuit, quand les éclairages jouent entre stucs finement ciselés, bois de cèdre et marbre sculpté et que les petites sources bruissent dans les patios.

Photo Michel Augendre, collaboration spéciale

L'Alhambra

Pour se perdre en ville: Balade dans Albaicin 

Juste en face de l'Alhambra, la colline de l'Albaycin déroule ses ruelles sinueuses - les Grenadins eux-mêmes s'y perdent - bordées de murs blanchis à la chaux. Nommé d'après l'arabe dialectal al-ba'isîn, «les misérables», le quartier le plus ancien de Grenade était à l'époque de la dynastie Nasride peuplé de musulmans démunis qui fuyaient la Reconquête espagnole. Il abrita aussi les artisans de la forteresse. Y cohabitent aujourd'hui les plus pauvres - sans moyens pour louer ailleurs - et les plus riches, propriétaires et locataires de «carmens» rénovés, demeures somptueuses ombragées de treilles.

Photo Michel Augendre, collaboration spéciale

Pendre la mesure de la «Reconquête»: Visite à la chapelle Royale

Isabelle de Castille et Ferdinand II d'Aragon doivent leur titre unique de Rois Catholiques au pape pour avoir achevé la Reconquista et chassé les derniers musulmans d'Europe en 1492. Meneuse d'une inquisition implacable, mais aussi garante des expéditions de Christophe Colomb, Isabelle la Catholique repose dans la chapelle Royale, oeuvre majeure de gothique espagnol (XVIe siècle) adossée à la cathédrale bâtie en lieu et place d'une mosquée. Plus de cinq siècles plus tard, les volontés de la reine fanatique sont toujours observées: messe quotidienne et cierge allumé 24 heures sur 24.

Photo Michel Augendre, collaboration spéciale

La chapelle Royale

À la rencontre des Gitans: Le flamenco de Sacromonte 

Juste derrière Albaicin, une communauté de Gitans vit dans des habitations semi-troglodytiques. Au service des nobles pour les entreprises guerrières, les travaux de forge et le dressage des bêtes de somme, ils furent persécutés au XVIIIe siècle pour le refus de se sédentariser et de s'assimiler. La découverte de la relique d'un évêque fit de leur refuge un lieu de pèlerinage. Au XIXe siècle, les Gitans offrirent des spectacles de flamenco aux pèlerins et maintenant aux touristes. Leur communauté - très fermée - s'est beaucoup réduite et le lieu a perdu de son authenticité. On se laisse néanmoins prendre au tourbillon des robes à volants, par les talons qui claquent et par ces voix perchées qui se cassent dans une plainte.

Photo Michel Augendre, collaboration spéciale

Une communauté de Gitans vivant derrière l'Albaicin offre des spectacles de flamenco.

Trouver les bonnes adresses: Sur la trace des étudiants

Fameuse pour sa situation géographique idéale, sa gastronomie et son art de vivre, Grenade attire chaque année 60 000 étudiants (sur 300 000 habitants intra-muros). Ils hantent les petits bars à thé en bas d'Albaicin et les nombreux comptoirs à tapas du centre ou les bistrots qui servent une cuisine de montagne, à base de charcuterie, de fèves ou de haricots. Les gourmands font le détour indispensable par le glacier Los Italianos. Depuis 1936 cette institution propose un festival de parfums bios et une spécialité, la cassata, une tranche de glace vanille-chocolat-fraise avec noisettes et fruits confits. Et les indolents s'abandonnent aux bassins et au massage traditionnel du hammam al Ándalus, reconstitué à l'emplacement des anciens bains maures.

Photo Michel Augendre, collaboration spéciale

Grenade attire chaque année 60 000 étudiants.