Le tennis québécois est victime de son propre succès. Il y a quelques années, les dirigeants des différentes fédérations souhaitaient attirer le plus de gens possible. Dorénavant, il manque d’espace pour accueillir tous ces initiés. Rencontre avec les trois nouveaux acteurs choisis pour assurer l’avenir du sport le plus en vogue au pays.

Les balles font des allers-retours, l’écho des frappes retentit partout dans le stade IGA. Aux abords de la surface de jeu, dans une zone de repos, les bottes et les chaussures de sport alternent. La satisfaction d’avoir gagné ou le regret d’avoir perdu s’affiche sur le visage des joueurs qui ont réservé une partie de leur lundi après-midi pour taquiner la raquette.

« C’est toujours plein comme ça. Il faut se battre pour avoir une place », évoque Hugues Léger en quittant son nouveau bureau au deuxième étage de l’édifice situé en bordure de la gare Parc. Il y a quelques jours, Léger a été nommé directeur général de Tennis Montréal. Au rez-de-chaussée, Valérie Tétreault et Andréanne Martin viennent le rejoindre.

Tétreault a été promue directrice de l’Omnium Banque Nationale il y a quelques semaines. Martin est devenue directrice générale de Tennis Québec il y a quelques mois.

Ensemble, ils ont la mission de gérer la croissance et le développement du tennis québécois.

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Notre journaliste a organisé une table ronde avec Hugues Léger, directeur général de Tennis Montréal, Valérie Tétreault, directrice de l’Omnium Banque Nationale, et Andréanne Martin, directrice générale de Tennis Québec.

Le trio se connaît et se côtoie depuis longtemps. On peut parler d’amitié entre eux. Les trois travaillent désormais dans le même édifice, et leurs bureaux respectifs sont à quelques pas l’un de l’autre.

« Il faut qu’il y ait une synergie entre les différentes organisations », clame Léger. Ce qui explique le travail de proximité entre les différents paliers. Celui qui a longtemps travaillé en gestion d’entreprise et en marketing voit le tennis québécois comme une pyramide, où chaque fédération représente un étage.

« C’est un canal de progression, explique-t-il, où chaque joueur essaie de se rendre au sommet grâce à notre appui et à notre soutien. »

Tétreault estime d’ailleurs que la fondation de cette pyramide est « très solide », sans compter que le trio a déjà les mains à la pâte pour améliorer ce système.

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Valérie Tétreault

Plus de terrains, moins de coûts

Les trois intervenants sont unanimes. Leur plus gros obstacle est « un beau problème ».

Entre les bruits des souliers qui frottent le ciment et produisent un son aussi aigu qu’un crescendo de Mariah Carey, le directeur général de Tennis Montréal insiste : le plus grand chantier du tennis québécois est l’accessibilité aux terrains intérieurs.

Les Québécois veulent jouer au tennis 12 mois sur 12. L’enjeu n’est plus de convaincre les gens de prendre une raquette, explique-t-il, c’est de leur trouver un endroit abordable et accessible pour le faire. Actuellement, l’offre ne convient pas à la demande.

« Ça met une pression sur les infrastructures, ce sont de gros investissements. Il faut qu’on discute avec nos partenaires. » Mais Léger tient à se faire rassurant, affronter ce problème est la priorité de tous.

Chez Tennis Québec, Martin souligne que le manque de terrains intérieurs ampute les nombreux tournois et les camps organisés par la fédération. Un problème de taille considérant que la mission de TQ est de développer la relève.

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Andréanne Martin

« L’inclusivité, c’est aussi de permettre à tout le monde de jouer. Si tous les jeunes qui voient Leylah ont le goût d’aller jouer au tennis et que c’est trop dispendieux pour qu’ils puissent pratiquer, on perdra des gens. »

Selon Tétreault, la solution réside dans la création de plus d’installations publiques. « Il n’y en a pas assez », revendique-t-elle. Pour régler la situation, elle précise qu’il faudra l’apport de tous les ordres, tant des municipalités que des instances nationales. La directrice de l’OBN veut tirer profit des occasions actuelles.

C’est un travail d’équipe et il faut que tout le monde sente ce besoin criant.

Valérie Tétreault, directrice de l’Omnium Banque Nationale

La directrice générale de Tennis Québec maintient cependant l’idée que les clubs privés sont importants, car ces institutions ont une histoire et un prestige qui servent aussi le tennis québécois. « Ça prend un équilibre », nuance-t-elle.

Pendant que la sirène indiquant le début de l’heure et la rotation de terrains se fait entendre, les trois experts parlent avec ferveur de la marche à suivre. Leur volonté est noble, mais il faudra prendre le taureau par les cornes pour arriver au bout de leurs intentions.

Léger parle de reconversion, de construction et de retapage. Il voit grand. « Peut-être même des toits pour les clubs extérieurs ! Il y aura peut-être des clubs privés à vendre. C’est pour ça qu’il faut regarder toutes les options. »

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Hugues Léger

Officiels demandés !

Si les fédérations veulent surfer sur la vague offerte par Félix Auger-Aliassime, Leylah Annie Fernandez et Alexis Galarneau, il faut tenir des tournois. Offrir la chance aux jeunes joueurs de la province de se faire valoir et de se développer. Pour ce faire, il faut avoir suffisamment de ressources et selon Andréanne Martin, le manque d’officiels est un obstacle à la tenue des compétitions.

« Tennis Québec a toujours été très fière d’avoir un officiel pour chacun de ses tournois, mais ce n’est pas le cas en ce moment. On en souffre vraiment et ça cause des problèmes. »

Elle reconnaît tout de même que son organisation a failli à la tâche dans ce dossier. « On avait un bassin qui était correct, mais on n’a pas assez bien renouvelé une autre génération. » Prise de court, la fédération doit combler un manque.

Ça prend des passionnés et on commence à renouveler notre bassin d’officiels. Pour nous, c’est un gros chantier.

Andréanne Martin, directrice générale de Tennis Québec

Puis, en plus de la recherche d’officiels, la directrice générale tient aussi à exprimer sa déception à l’égard de l’attitude des jeunes joueurs sur le terrain. Elle a parcouru les tournois aux quatre coins de la province au cours de la dernière année. « Je trouve que nos jeunes ont vraiment besoin d’améliorer leur esprit sportif entre eux et le respect avec les officiels. On a beaucoup d’éducation à faire. »

D’ailleurs, Tétreault souhaite aussi conscientiser les parents de joueurs qui, souvent, sont démunis. « En ce moment, ce n’est pas simple pour un parent qui veut inscrire son enfant au tennis de savoir par où passer et comment ça fonctionne. »

Tennis Montréal, Tennis Québec et Tennis Canada marchent main dans la main en quête de l’exceptionnel. Il y a encore beaucoup à faire, mais tout le monde s’entend sur la marche à suivre. « On va être plus forts ensemble », conclut Tétreault.