La bonne nouvelle : les connaissances scientifiques progressent rapidement sur le Zika, ce virus qui provoque une importante épidémie en Amérique latine. La mauvaise : ces nouvelles informations n'ont rien de rassurant. « Plus nous en savons, plus dramatique semble la situation », a résumé la Dre Margaret Chan, directrice générale de l'Organisation mondiale de la santé, dans son dernier message sur le sujet. Voici ce que l'on sait et qu'on ignore aujourd'hui sur le virus.

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Des chercheurs tentent actuellement de développer un test diagnostique simple pour détecter le virus du Zika. Actuellement, les échantillons doivent être traités par des laboratoires spécialisés et la fiabilité des tests est souvent mauvaise.

CE QUE L'ON SAIT

Le Zika peut causer des microcéphalies

La plus grande crainte relative au Zika fait maintenant l'objet d'un consensus scientifique : le virus peut causer des microcéphalies chez les bébés. Les femmes qui se font infecter pendant la grossesse courent donc le risque d'accoucher de bébés à la tête trop petite, une condition souvent accompagnée de retards mentaux et de troubles de développement. Au Brésil, en particulier, les autorités avaient noté une flambée des cas de microcéphalies depuis l'arrivée du Zika. « Le drame, c'est qu'une fois qu'on le sait, on ne peut rien faire, sauf interrompre la grossesse », souligne Anne Gatignol, chercheuse à l'Institut Lady Davis de recherches médicales et professeure au département de microbiologie et d'immunologie à l'Université McGill.

Le Zika peut causer le syndrome de Guillain-Barré

Autre effet maintenant confirmé : le Zika peut causer le syndrome de Guillain-Barré, une affection sérieuse dans laquelle le système immunitaire attaque les nerfs. La plupart des gens touchés finissent par retrouver la santé, mais la situation montre qu'il n'y a pas que les femmes enceintes qui doivent prendre le Zika au sérieux.

Malgré ces effets graves, le Zika est plutôt inoffensif la plupart du temps. Les trois quarts des gens infectés ne s'en rendront même pas compte, et la plupart des autres s'en tireront avec une fièvre et des boutons.

Le Zika peut se transmettre sexuellement

Le Zika se transmet principalement par la piqûre d'un moustique infecté, mais il est maintenant confirmé qu'il peut aussi être transmis lors des relations sexuelles.

Le Canada reste relativement épargné

L'épidémie actuelle de Zika touche surtout l'Amérique latine et les Caraïbes, ainsi qu'une poignée d'îles en Océanie. Santé Canada considère que le risque pour les Canadiens demeure « très faible » pour une raison simple : l'espèce de moustique qui transmet le virus ne vit pas à nos latitudes.

En date d'hier, Santé Canada avait répertorié 43 infections chez des Canadiens. Dans tous les cas, les gens ont contracté le virus à l'étranger. Anne Gatignol, de McGill, croit cependant que le nombre de cas réels est « beaucoup plus élevé ».

« Pour des raisons de coûts, on ne fait pas tous les diagnostics », dit-elle.

Il n'est pas impossible que les Canadiens infectés à l'étranger infectent d'autres Canadiens par voie sexuelle. Les experts estiment toutefois que ce mode de transmission n'est pas assez efficace pour déclencher une épidémie.

CE QU'ON IGNORE

La recette du vaccin

On ne sait aujourd'hui ni guérir le Zika avec un médicament ni le prévenir avec un vaccin. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), 23 projets de recherche en vue de trouver un vaccin sont actuellement en cours aux États-Unis, en France, au Brésil et en Inde. L'OMS estime que quelques-uns de ces projets commenceront à être testés sur des humains dès cette année, mais avertit qu'il pourrait falloir « plusieurs années » pour qu'un vaccin soit approuvé et disponible. Le fait que le vaccin serait utilisé sur des femmes enceintes amène des « standards de sécurité extrêmement élevés », souligne l'OMS.

Une méthode de diagnostic rapide

Encore plus que le développement d'un vaccin, l'OMS estime que la priorité la plus urgente est de développer un test diagnostique simple. Actuellement, les échantillons doivent être traités par des laboratoires spécialisés et les délais sont importants. La fiabilité des tests actuels est aussi souvent mauvaise. Une trentaine d'entreprises planchent actuellement sur de nouveaux tests.

La durée de l'infection

Deux à trois semaines après une infection au Zika, on ne détecte plus de virus dans le sang des patients. « Mais il y a peut-être des endroits dans le corps où il reste, dit Mme Gatignol. Dans le sperme, par exemple, on peut le détecter jusqu'à deux mois après. » Des réponses à cette question amélioreraient les pratiques pour éviter la transmission du virus.

LES CONSEILS DE SANTÉ CANADA

• Si vous vous rendez dans une zone touchée, protégez-vous contre les moustiques.

• Les femmes enceintes ou qui prévoient le devenir devraient éviter, si possible, de se rendre dans les zones touchées.

• Les femmes qui veulent tomber enceintes devraient attendre au moins deux mois après être revenues d'un pays touché avant d'essayer de concevoir. Anne Gatignol, de McGill, recommande même d'attendre trois mois.

• Les hommes qui reviennent d'un pays touché devraient utiliser le condom pendant six mois après leur retour s'ils ont des relations sexuelles avec une femme qui pourrait tomber enceinte. Si leur partenaire est déjà enceinte, ils devraient utiliser le condom jusqu'à la fin de la grossesse.