La technologie rend peu à peu caduque la notion de handicap. Grâce aux contrôles électroniques, aux interfaces voix-texte et aux pas de géant de la neurotechnologie, les handicapés ont de plus en plus accès au monde et peuvent y contribuer autant sinon plus que les autres.

C'est du moins l'une des thèses de Jorge Silva, un ingénieur biomédical de l'Université de Toronto qui participera vendredi prochain à une conférence à Montréal. La conférence TEDx, qui porte sur l'innovation en santé, aura lieu à la Cinémathèque québécoise.

«Il faut voir les handicaps non en termes de déficit, mais comme le produit d'une lacune de l'environnement», explique M. Silva, joint dans la Ville reine. «Quand l'environnement ou la société peut s'adapter aux différences entre individus, notamment grâce à la technologie, le handicap n'est plus important.»

Cela signifie que les concepteurs des appareils destinés aux handicapés doivent se concentrer sur leurs besoins plutôt que sur leur handicap. «Ça demande un changement de paradigme. Traditionnellement, les ingénieurs voulaient rendre les handicapés semblables aux autres personnes, par exemple en restaurant leur ouïe, en leur donnant une prothèse de main, de jambe. Mais du point de vue de l'usager, l'important n'est pas ce qui lui manque, mais ce qu'il ne parvient pas à faire. Je me souviens d'un homme qui voulait absolument pêcher, mais n'y parvenait pas parce que les prothèses de mains ne permettaient pas de bien manipuler la canne à pêche. La solution était d'oublier la forme précise des mains et de concevoir une prothèse permettant de manier la canne à pêche. Pour vraiment tirer profit de toutes les possibilités qu'ouvrent les progrès technologiques, il faut se concentrer sur les besoins des usagers. Parfois, il faudra restaurer l'organe manquant. Mais pas toujours, particulièrement s'il s'agit d'une partie du corps très complexe, comme les mains.»

Cet accent mis sur l'usager, qu'il s'agisse du patient, du médecin, de l'infirmière ou du préposé aux bénéficiaires, est au coeur de la réflexion de l'organisatrice de la conférence, Pascale Lehoux du département d'administration de la santé de l'Université de Montréal. «Pour bien s'implanter, les innovations technologiques doivent vraiment voir les problèmes du point de vue de l'usager, dit Mme Lehoux. Par exemple, il a fallu plusieurs années pour qu'apparaissent les appareils d'imagerie médicale portables, parce que toute l'attention était portée sur les grands centres spécialisés qui avaient besoin des appareils les plus poussés possible.»