La structure des mâchoires des animaux n'a quasiment pas évolué depuis que sa forme actuelle a vu le jour dans les profondeurs marines voici environ 400 millions d'années, selon une étude publiée mercredi.



Avant la période du Dévonien, un épisode de sélection naturelle intense et relativement bref - à l'échelle géologique -, a abouti à l'éclosion d'une multitude de structures différentes pour les mâchoires. L'évolution s'est ensuite brusquement stabilisée pour aboutir à ce modèle de bouche articulée qui prévaut encore actuellement, estiment les chercheurs.

Aujourd'hui, plus de 99% des vertébrés, dont les êtres humains, possèdent des mâchoires conçues selon la même architecture: une mâchoire supérieure («maxillaire») plus ou moins fixée au squelette et une mâchoire inférieure mobile («mandibule»).

Il y a quelque 420 millions d'années, des poissons caparaçonnés dépourvus de mâchoires régnaient pourtant en maîtres dans les mers, lacs et rivières de notre planète.

Jusqu'à présent, les scientifiques estimaient que l'émergence de créatures marines dotées d'une bouche articulée avait abouti à la disparition rapide de ces poissons sans mâchoires. Les nouveaux arrivants, avec leurs mâchoires articulées, auraient été des chasseurs et des charognards plus performants.

L'étude publiée par la revue britannique Nature contredit toutefois cette théorie. «La variété des mécanismes par lesquels les premiers animaux à mâchoires se nourrissaient semble n'avoir eu que très peu, voire pas du tout, d'impact sur la diversité des poissons sans mâchoires», estime le Pr Philip Anderson, enseignant à l'Université britannique de Bristol et auteur principal de cette étude.

Les deux groupes ont en effet co-existé pendant au moins 30 millions d'années. Et lorsque les «sans mâchoires» ont fini par disparaître, aucune évolution notable n'a été constatée chez leurs cousins à mandibule, ce qui suggère que les deux groupes n'étaient pas en concurrence directe.

De précédentes recherches faisaient un lien entre l'émergence d'une grande variété de vertébrés à mâchoires («Gnathostomes») et une augmentation de la teneur en oxygène de l'atmosphère terrestre et des océans survenue voici environ 400 millions d'années.

Une idée là encore remise en cause par l'étude du Pr Anderson, qui s'appuie sur la physique et la mécanique pour analyser la façon dont cette faune primitive se nourrissait. «Nos résultats font remonter le début de cette diversification des vertébrés à mâchoires bien avant cette date», assure-t-il.