La comète Tchouri, observée par la sonde européenne Rosetta, a sans doute perdu désormais le fin manteau de poussières qui recouvrait sa surface, car elle se rapproche de plus en plus du Soleil et se réchauffe, selon une étude.

La comète Tchourioumov-Guérassimenko, qui fait le tour de son orbite en 6,6 ans, sera le 13 août au plus proche du Soleil. Elle sera alors à 186 millions de kilomètres de celui-ci, soit grosso modo entre les orbites de la Terre et de Mars.

Embarqué à bord de Rosetta, qui s'est mise en orbite autour de la comète depuis août dernier, un spectromètre de masse baptisé COSIMA réalise des analyses chimiques des grains de poussière provenant de la comète.

«Les grains que nous avons recueillis entre août et octobre sont floconneux et poreux. Les plus gros se disloquent lorsqu'ils arrivent sur les cibles métalliques collectrices de l'instrument», indique à l'AFP Christelle Briois, enseignant-chercheur du CNRS à l'Université d'Orléans (France). «Tchouri» se trouvait alors à des distances d'environ 535 millions à 450 millions de kilomètres du Soleil.

La comète commençait à devenir de nouveau active, avec des jets de gaz et de poussières, après avoir passé quatre ans dans le froid à de grandes distances du Soleil.

Les grains collectés se sont avérés très riches en sodium, relève Mme Briois, chimiste et l'un des co-auteurs de l'étude publiée dans la revue britannique Nature. «En outre, ils ne contiennent pas de glace».

«Nous pensons que les particules collectées sont vraisemblablement les parents des Particules de Poussières Interplanétaires» (IDP en anglais) que l'on trouve dans le système solaire, déclare à l'AFP Rita Schulz, scientifique à l'Agence spatiale européenne (ESA), principal auteur de l'étude.

Ces minuscules particules de poussières interplanétaires, collectées pour la première fois dans les années 1970, se transforment parfois en étoiles filantes lorsqu'elles entrent dans l'atmosphère terrestre.

Comme un oignon

Leur provenance est incertaine et depuis plusieurs années, on pense qu'elles pourraient provenir de comètes et d'astéroïdes. «Mais c'est la première fois que l'on établit qu'elles trouvent leur origine dans une comète», selon Mme Schulz.

Le noyau d'une comète est constitué de glaces et de matériaux minéraux et organiques. À chaque passage devant le Soleil, il perd une couche, un peu comme un oignon.

En effet, sous l'effet du rayonnement solaire plus intense, une partie des glaces se subliment, passant directement de l'état solide à l'état gazeux. Des poussières sont entraînées par les gaz et cela forme la «chevelure» (coma) de la comète. Ensuite naissent une queue d'ions et une queue de poussières, caractéristique des comètes.

«Les grains qui ont été analysés par COSIMA proviennent d'un précédent passage de la comète près du Soleil. Après avoir été soulevés à l'approche du Soleil, «ils sont retombés à la surface formant une sorte de manteau», a expliqué Mme Briois.

La comète étant repartie vers des régions froides pour plusieurs années, les rejets de gaz se sont considérablement réduits et n'ont plus été assez puissants pour soulever les poussières tandis que s'opérait un dessèchement du noyau, conduisant à la formation d'un «manteau».

Maintenant que la comète se réchauffe de nouveau, la production de gaz est en augmentation. Les grains sont soulevés et rejoignent la «chevelure» de la comète.

Le manteau de poussières devait avoir une épaisseur de 12 centimètres environ, selon Rita Schulz, qui se base sur des observations réalisées en 2008 par le VLT (Very Large Telescope) de l'observatoire européen austral (ESO).

En s'appuyant sur de précédentes observations, les scientifiques ont calculé que ce manteau a sans doute complètement disparu aux alentours du 20 janvier.

COSIMA poursuit son travail de plus belle. Les chercheurs pensent découvrir des grains «avec des propriétés très différentes» de celles des grains trouvés au début de la mission Rosetta, souligne Mme Schulz.

Martin Hilchenbach, investigateur principal de COSIMA à l'institut Max-Planck (Allemagne) s'attend à trouver des grains «plus riches en glace dans les prochains mois».