Les talibans afghans ont annoncé mardi le début de leur «offensive de printemps», refusant de négocier la paix avec le gouvernement de Kaboul dont les troupes vont subir leur deuxième saison des combats sans le soutien direct de l'OTAN.

À la faveur d'un hiver doux et de la posture agressive de la nouvelle direction du mouvement, les talibans n'ont en fait observé aucune trêve hivernale cette année.

Les combats sont particulièrement féroces dans le Helmand, province méridionale d'où provient la majorité de l'opium afghan et dont les insurgés contrôlent la plupart des districts.

La situation y est à ce point dramatique que l'armée afghane, qui doit se battre seule en première ligne depuis le terme de la mission de combat de l'OTAN fin 2014, a reçu l'appui des conseillers militaires américains et britanniques.

Pour cette nouvelle offensive, baptisée «Opération Omari», en l'honneur du mollah Omar, fondateur du mouvement dont la mort a été annoncée en juillet dernier, les talibans ont dit vouloir «lancer des attaques de grande envergure contre des positions ennemies dans tout le pays».

Interrogé par l'AFP, Sediq Sediqqi, le porte-parole du ministère de l'Intérieur, a assuré que «les talibans veulent prouver qu'ils sont toujours là. Ces quatorze dernières années, depuis la chute de leur régime, ils n'ont pas atteint leurs objectifs et nous ne leur permettrons pas de les atteindre».

Mais l'analyste politique Haroun Mir prévient: «on peut s'attendre à une des pires années pour l'Afghanistan en termes de violence et de sang versé».

Dans leur communiqué envoyé à l'AFP et mis en ligne sur leur site, les insurgés annoncent également des opérations «menées par des martyrs contre des fiefs ennemis», c'est-à-dire des attentats-suicides.

Ils ont souvent recours à cette tactique contre la police et l'armée afghanes. Lundi, 12 recrues de l'armée ont ainsi péri dans un attentat-suicide revendiqué par les talibans dans l'est.

Mais les islamistes comptent aussi s'attaquer aux 13 000 soldats de l'OTAN afin de les «démoraliser et de les forcer à quitter (leur) pays».

5500 soldats et policiers tués en 2015

Le départ des soldats étrangers est l'une des principales exigences des talibans pour revenir à la table des négociations.

L'été dernier, un premier dialogue direct avait eu lieu au Pakistan. Mais le contact a été brusquement rompu à l'annonce surprise de la mort du mollah Omar.

Pour tenter de relancer ce processus de paix direct, Afghans, Pakistanais, Chinois et Américains se réunissent périodiquement à Islamabad et Kaboul depuis le mois de janvier.

Ces efforts n'ont encore donné aucun résultat et l'annonce d'une «nouvelle offensive de printemps» augure mal pour ce dialogue appelé de ses voeux samedi par le secrétaire d'État américain John Kerry lors d'une visite surprise à Kaboul.

La stratégie offensive des talibans afghans est aussi à mettre sur le compte de la nouvelle direction du mouvement et de son chef, le mollah Akhtar Mansour, qui tente d'asseoir une autorité que lui contestent nombre de cadres, mécontents du processus ayant mené à sa désignation l'été dernier.

Certains combattants talibans ont d'ailleurs rejoint les rangs de factions dissidentes, et d'autres ceux du groupe État islamique, surtout implanté dans l'est de l'Afghanistan.

Face à eux, l'armée et la police afghanes sont débordées. Les insurgés ont ouvert des fronts dans tout le pays, notamment dans le nord, une région plutôt stable par le passé.

L'an dernier, «environ 5500» soldats et policiers afghans ont péri, selon le général Charles Cleveland, porte-parole de «Soutien résolu», la mission de l'Alliance atlantique.

Face à cette hécatombe, des voix se sont élevées à Kaboul pour que l'armée américaine ralentisse la cadence de retrait de ses troupes. Elles sont 9800 à l'heure actuelle et le président Barack Obama a prévu d'abaisser ce chiffre à 5500 d'ici 2017.

Le nouveau patron des forces étrangères, le général américain John Nicholson, «évalue» le rythme de ce retrait, a-t-il indiqué au Sénat américain récemment, et pourrait suggérer à Washington de maintenir une présence militaire plus importante que prévu.