Personnage important des attentats du 11 septembre 2001, le mystérieux mollah afghan Mohammed Omar a été déclaré officiellement mort hier. Quel sera l'impact de cette nouvelle sur les pourparlers de paix entre les talibans et le gouvernement afghan?

Q: Qui était le mollah Mohammed Omar?

R: Né en 1960 dans la province de Kandahar, Mohammed Omar était chef des talibans depuis 1996. Austère et strict, il affectionnait les lance-roquettes russes RPG 7, ne possédait ni maison ni compte en banque, et était un homme affable doté d'un sens de l'humour «spécial» - du moins, selon sa biographie parue en avril dernier. Après avoir combattu les Soviétiques dans les années 80 (et où il a été blessé par un éclat d'obus à l'oeil droit), il avait unifié les moudjahidines en 1994 avant de devenir chef religieux en 1996, puis de diriger le pays jusqu'en 2001.

Q: Quel était son rôle dans les attentats du 11 septembre 2001?

R: Sur le champ de bataille, il avait fait la connaissance d'Oussama ben Laden. En 1997, il offre l'asile au chef d'Al-Qaïda, qui s'installe en Afghanistan pour entraîner ses combattants. Après les attentats du 11-Septembre, les Américains débarquent en Afghanistan pour traquer ben Laden et ses complices. Le mollah Omar, qui avait refusé de livrer ben Laden, s'enfuit et disparaît pour toujours de l'écran radar. Les services de renseignements croient qu'il s'est caché dans les environs de Quetta, au Pakistan. Les États-Unis avaient mis sa tête à prix pour 10 millions de dollars.

Q: Quand serait-il mort?

R: Hier, le gouvernement afghan a confirmé la rumeur selon laquelle le mollah Omar est mort en avril 2013 à Karachi, au Pakistan. «Il y avait des suppositions depuis des années», dit Vanda Felbab-Brown, spécialiste de l'Afghanistan à l'institut Brookings, à Washington. «On n'avait pas de communication directe de sa part depuis quelques années.» Le dernier message audio de sa part remontait à 2006. Le silence du chef aurait suscité de l'insatisfaction chez les talibans et des fractures dans le mouvement. Aucun chef n'a encore été désigné pour lui succéder. Les talibans n'ont ni confirmé ni infirmé hier l'annonce de Kaboul.

Q: Comment cette annonce s'inscrit-elle dans les pourparlers de paix entre talibans et gouvernement afghan?

R: Il y a deux semaines, à la fin du ramadan, un message attribué au mollah Omar était diffusé sur le web. Selon la lettre, le mollah Omar accordait son soutien aux pourparlers de paix en précisant que «l'islam n'interdisait pas les interactions pacifiques entre ennemis». La deuxième ronde de négociations de paix pour stabiliser le pays devait justement commencer vendredi... Pour le gouvernement afghan, cette annonce de la mort est l'occasion pour «tous les combattants» de «rejoindre le processus de paix». Mais pour Mme Felbab-Brown, l'annonce n'augure rien de bon. «Je pense que ça peut avoir un impact potentiellement négatif», dit-elle. Déjà, plusieurs talibans s'opposent à l'idée de déposer les armes. «Il y a aussi une lutte entre les talibans et le groupe armé État islamique (EI) en Afghanistan», rappelle la spécialiste, estimant que cette disparition pourrait affaiblir les talibans et renforcer l'EI.

Q: Le mollah Omar était l'un des hommes les plus recherchés par les États-Unis. Comment était-il perçu par les Afghans?

R: «Je ne pense pas qu'il était aimé par les gens, dit Mme Felbab-Brown. Contrairement au commandant Massoud, par exemple.» L'homme était chef d'un régime brutal en Afghanistan, particulièrement pour les femmes. Pendant ce temps, l'EI tente de séduire les talibans afghans désireux d'étendre le pouvoir de l'islam au-delà des frontières - le groupe a déjà reproché au mollah d'être un chef «nationaliste» qui s'opposait à son ambition d'établir un grand califat.