Le mystère entourant les circonstances du suicide d'un Australien présenté comme un agent du Mossad qui était détenu dans le plus secret en Israël selon une télévision australienne a déclenché mercredi une polémique médiatique et politique.

La censure israélienne avait interdit mardi de relayer des informations sur cette affaire révélée par la chaîne de télévision australienne ABC. Mais ce silence imposé a été brisé par trois députés d'opposition qui, profitant de leur immunité parlementaire, ont interrogé au Parlement le ministre de la Justice Yaakov Neeman sur cette affaire.

Et les médias ont finalement été autorisés mercredi à faire état des informations d'ABC.

« Les médias peuvent désormais utiliser ce qui a été publié à l'étranger, mais l'interdiction totale concernant les raisons de la détention (du ressortissant australien) reste en vigueur », a affirmé à l'AFP un responsable du service de la censure.

Les médias israéliens ont ainsi pu rapporter que, selon ABC, un Australien s'appellant Ben Zygier, recruté par le Mossad, les services de renseignements israéliens, a été retrouvé pendu dans sa cellule de la prison Ayalon près de Ramleh, au sud de Tel-Aviv, en décembre 2010.

L'homme serait arrivé en Israël sous le nom de Ben Alon. Il aurait ensuite vécu une dizaine d'années dans ce pays avant d'être arrêté.

En général, pour contourner la censure notamment pour les affaires de renseignements, les opérations militaires ou les assassinats ciblés en dehors du pays, les médias israéliens utilisent les informations publiées à l'étranger. Mais dans ce cas, ce stratagème leur a été interdit jusqu'à mercredi.

Interpellé au Parlement, Yaakov Neeman s'était contenté d'affirmer que « les prisons sont sous la juridiction du ministère de la Sécurité intérieure », tout en soulignant que « tout cela mérite examen ».

« Monsieur X »

Le ministre de la Sécurité intérieure, Yitzhak Aharonovitch, devait, selon la radio publique, répondre à des questions orales mercredi après-midi au Parlement.

L'ex-ministre des Affaires étrangères Avigdor Lieberman a pour sa part dénoncé à la radio les députés ayant évoqué cette affaire.

« Une fois de plus, certains parlementaires n'hésitent pas à se solidariser avec l'ennemi et profitent de leur immunité pour violer la censure », a-t-il dit tout en affirmant « ne rien savoir » sur le fond de cette affaire.

En Australie, le chef de la diplomatie Bob Carr a ordonné un examen de l'affaire. Il a affirmé qu'il n'hésiterait pas à demander des explications à Israël « sur ce qui s'est passé » tout en précisant que ses services n'avaient pas été contactés par la famille de Ben Zygier et qu'il n'y avait eu « aucune demande d'assistance consulaire durant la période de sa détention présumée ».

Pour la plupart des commentateurs israéliens, les pratiques de la censure à l'heure d'internet et des réseaux sociaux tels que Facebook ou Twitter sont complètement dépassées. « Nous ne sommes plus à l'époque où la censure pouvait imposer un silence total », a souligné un présentateur de la radio publique.

Yossi Melman, commentateur pour les affaires de renseignements du site Walla, estime lui aussi que la « censure, l'armée et le gouvernement doivent se rendre compte que nous vivons au 21e siècle et qu'il n'est plus possible de tout garder secret. Si on avait permis de publier il y a deux ans les informations sur cet Australien, l'affaire serait déjà close et enterrée », a-t-il ajouté.

En juin 2010, le site d'information israélien Ynet avait indiqué qu'un certain « Monsieur X » était emprisonné. Mais cette information avait été subitement retirée moins d'une heure après sa publication.