Le chef radical chiite Moqtada Sadr, qui jouit toujours d'une immense popularité chez les chiites défavorisés d'Irak, est rentré au pays mercredi sous les acclamations de ses partisans rassemblés dans son bastion de Najaf, après quatre années passées à l'étranger.

Vers 17h, le jeune chef âgé d'une trentaine d'années, coiffé du turban noir typique des «sayyid» -ou descendant du Prophète- s'est rendu au mausolée de l'imam Ali, l'un des lieux les plus saints du chiisme, entouré de gardes du corps, selon un journaliste de l'AFP.

Auparavant, un responsable de son puissant courant politique avait indiqué que Moqtada Sadr était arrivé vers 15H00 avec plusieurs dirigeants de son mouvement à Najaf, à 150 km au sud de la capitale.

«Ce n'est pas juste une visite. Il va demeurer à Najaf», a-t-il ajouté, rappelant que son chef avait quitté l'Irak à la fin de 2006. Il a résidé ces dernières années en Iran, où il suivait des études religieuses, selon ses partisans.

A l'annonce de son retour, des centaines de ses partisans se sont massés dans les rues du quartier d'Al-Hannana, où se trouve sa maison, dans le centre de Najaf.

«Je n'ai pas de mot pour décrire mon bonheur quand j'ai appris le retour de Moqtada», a déclaré Mohamed Hussein, un commerçant de 33 ans. «Je suis venu en courant pour vérifier de mes propres yeux que c'était vrai.»

Après la visite du mausolée d'Ali, Moqtada Sadr devait aller rendre visite au Grand ayatollah Ali Sistani, le plus influent dignitaire chiite d'Irak, selon un responsable de son mouvement.

Né dans les années 1970, Moqtada Sadr jouit toujours aujourd'hui d'une immense popularité chez les chiites, notamment au sein des couches sociales les plus pauvres, en particulier à Najaf et dans l'immense quartier de Sadr City, à Bagdad.

Moqtada Sadr avait créé en 2003 l'Armée du Mahdi, une milice longtemps considérée comme la plus puissante en Irak avec 60 000 hommes et qui a plusieurs fois affronté l'armée américaine lors de sanglantes révoltes.

Le Pentagone considérait en 2006 l'Armée du Mahdi comme l'une des plus grandes menaces pour la stabilité de l'Irak.

Il avait décrété en août 2008 un arrêt définitif des opérations de l'Armée du Mahdi, un an après l'annonce d'une trêve unilatérale d'un an, respectée à l'exception de combats au printemps 2008.

Pour autant, les autorités américaines vouent toujours une profonde méfiance à l'égard de Moqtada Sadr. Contactée par l'AFP, l'ambassade des États-Unis a refusé de s'exprimer sur son retour.

Moqtada Sadr demeure à la tête d'un groupe politique majeur sur la scène irakienne, le courant sadriste, qui bénéficie de 39 députés sur 325 au Parlement et de six ministres au gouvernement. Le vice-président du Parlement, Qoussaï Abdel Wahab al-Souhai, est également issu de ses rangs.

Après les législatives de mars 2010, le mouvement sadriste s'est longtemps opposé au maintien au pouvoir du premier ministre irakien Nouri al-Maliki, lui reprochant notamment d'avoir lancé une campagne militaire contre l'Armée du Mahdi en 2008.

Mais il s'est ravisé en mai, et ce soutien s'est avéré crucial pour permettre à M. Maliki de se maintenir au pouvoir.

Lors de sa dernière visite en Iran en octobre, le chef du gouvernement était allé rencontrer Moqtada Sadr dans la ville sainte de Qom, selon le site internet de la télévision iranienne Al-Alam TV. Trois mois plus tôt, Sadr s'était entretenu à Damas avec le rival de M. Maliki, l'ancien chef du gouvernement irakien Iyad Allawi.

Moqtada Sadr est le fils de Mohammed Sadek Sadr, héraut d'un chiisme militant et assassiné par les forces de l'ex-président Saddam Hussein en 1999, et cousin issu de germain de Mohamed Baker, grand philosophe et penseur chiite, éliminé en 1980.