La campagne pour l'élection présidentielle afghane du 20 août a commencé officiellement mardi, placée sous le signe des violences des talibans dont le président Hamid Karzaï n'est pas parvenu à endiguer la flambée malgré l'aide des forces internationales.

Les affiches couvrent depuis mardi arbres, poteaux, véhicules et panneaux de signalisation à Kaboul, où 30 véhicules tapissés d'affiches de Mirwais Yasini, président adjoint du parlement, parcouraient les rues au son de hauts-parleurs exhortant à voter pour leur champion.

A l'opposé, aucun portrait de candidats n'était visible à Kandahar, bastion des talibans dans le sud. Haji Agha Lalai, membre du conseil provincial, a évoqué «des raisons de sécurité».

L'ex-ministre de l'Economie Ashraf Ghani, un des principaux adversaires du sortant Hamid Karzaï, a rencontré un millier de personnes dans sa maison de Kaboul.

Un autre poids lourd, l'ancien ministre des Affaires étrangères Abdullah Abdullah, devait tenir un meeting jeudi.

Quant à l'équipe de M. Karzaï, elle a rejeté toute baisse de popularité du président, martelant que «Karzaï devance tous les autres».

Certains l'accusent d'utiliser les ressources gouvernementales pour sa campagne. Un représentant de la Commission électorale indépendante, Daoud Ali Najafi, a indiqué que le président avait accepté de ne pas utiliser les moyens étatiques.

Au total, 41 candidats, dont deux femmes, se présentent à la seconde présidentielle au suffrage universel direct de l'histoire du pays.

Mardi a également débuté la campagne des élections provinciales: 3.196 candidats concourent pour 420 sièges dans les 34 conseils provinciaux. Deux candidats ont été tués récemment.

La campagne s'achèvera le 17 août, trois jours avant le scrutin.

M. Karzaï, déjà vainqueur en 2004 avec 55,4% des voix, reste favori malgré son exécrable bilan en matière de sécurité.

Après une aggravation ces deux dernières années, la première semaine de juin a connu «le plus haut niveau d'incidents» violents depuis la chute des talibans fin 2001, selon le général David Petraeus, commandant des forces américaines en Irak et en Afghanistan.

Et la semaine dernière, renchérit le ministre de l'Intérieur Mohammad Anif Atmar, les attaques ont encore augmenté de 40% par rapport à la semaine précédente, malgré la présence de 90 000 soldats étrangers des deux forces internationales, celle de l'Otan et celle menée par les Etats-Unis.

Les observateurs s'attendent à une nouvelle détérioration, les opérations des forces étrangères et afghanes s'intensifiant.

«Des mois difficiles s'annoncent» et les violences «vont augmenter», prédit le général Petraeus.

Malgré cette situation alarmante, Hamid Karzaï a réussi à diviser l'opposition.

Le Pachtoune (première ethnie du pays) s'est rallié différents leaders: celui du principal parti d'opposition, le sulfureux chef de guerre tadjik (deuxième ethnie) Mohammad Qasim Fahim, ainsi que l'Ouzbek Abdul Rashid Dostam (10% des voix à la présidentielle en 2004) et le hazara Haji Mohammed Mohaqiq (11,7% en 2004).

Le représentant de l'ONU en Afghanistan, Kai Eide, a appelé dans un communiqué les candidats à «faire campagne avec dignité et équité» et à éviter «l'intimidation, les discours provocateurs et la violence».

Cela «est d'une importance cruciale pour s'assurer que les élections seront crédibles», a conjuré M. Eide.

Les observateurs craignent néanmoins une abstention massive motivée par la peur de violences et une désillusion croissante de la population vis-à-vis de la classe politique.