La chancelière allemande a annoncé lundi le lancement la semaine prochaine de pourparlers sur la formation du prochain gouvernement fédéral, alors qu'un premier désaccord s'annonce entre conservateurs, Verts et Libéraux sur la question très sensible de l'accueil des réfugiés.

Après une victoire décevante aux législatives du 24 septembre et une percée historique de l'extrême droite, Angela Merkel a fait dimanche une concession politique de taille à l'aile la plus conservatrice de sa famille politique, la CSU bavaroise, acceptant de se fixer pour objectif de ne pas accueillir annuellement plus de 200 000 demandeurs d'asile.

Même s'il ne s'agit pas d'un plafond ferme, le patron de CSU Horst Seehofer s'est dit lundi, à côté de la chancelière, très «content et satisfait».

Affirmant avoir réussi à unifier les positions de son parti, la CDU, et celles de la CSU, Mme Merkel a du coup annoncé lundi l'ouverture le 18 octobre de pourparlers préliminaires avec Verts et les Libéraux pour former une majorité gouvernementale.

«Pour nous, la journée d'hier était avant tout importante, car il fallait que la CDU et la CSU arrivent avec une position commune (...) à ces négociations», a reconnu lundi la chancelière.

«La CDU/CSU vont inviter d'abord le FDP (libéraux) puis les Verts le 18 octobre pour des discussions séparées. Ensuite, le vendredi 20 octobre, des discussions exploratoires avec tous les partenaires auront lieu», a-t-elle encore dit devant la presse à Berlin.

Prévues pour durer des mois, ces négociations commenceront par ailleurs après une élection régionale en Basse-Saxe dimanche. Ce scrutin est à haut risque pour la CDU qui, après avoir été longtemps donnée en tête dans les sondages, est désormais au coude-à-coude avec les sociaux-démocrates (SPD).

Affaiblie par le plus mauvais score (32,9 %) des siens aux législatives depuis 1949, Mme Merkel a désormais la tâche ardue de réunir les conservateurs, les Verts et les libéraux du FDP dans une majorité.

Critiques vertes

Or la question migratoire est un sujet de discorde. Ainsi, le compromis entre conservateurs a déjà été accueilli avec réserve par les Verts.

«C'est peut-être la position de la CDU/CSU, mais ce ne sera pas celle d'un futur gouvernement», a lâché lundi matin le coprésident des écologistes, Cem Özdemir. «Je suis curieux de voir comment ils vont essayer de nous vendre ça», a-t-il ajouté.

La cheffe des députés écologistes Katrin Göring-Eckardt a elle jugé que l'accord CDU/CSU avait tout d'un «compromis de pure forme» pour paraître uni face aux Verts et aux libéraux.

Du côté du FDP, la vice-présidente Marie-Agnes Strack-Zimmermann s'est montrée prudente, se réjouissant que les conservateurs «se parlent enfin de nouveau» tout en qualifiant leur compromis de «première base avant les (véritables) pourparlers sur la (formation) du gouvernement».

Elle a par ailleurs souligné que «le droit d'asile doit être mis en oeuvre en fonction des principes de l'État de droit» qui interdisent tout plafonnement artificiel.

Nombreux désaccords

La CSU réclame depuis deux ans à Mme Merkel de limiter à 200 000 les arrivées annuelles de demandeurs d'asile en Allemagne, ce que la chancelière refusait au nom de principes humanitaires et constitutionnels.

Au final le compromis annoncé dimanche prévoit non pas un plafond, mais un objectif chiffré de 200 000, une sorte de limite «light» qui ne portera pas sur les arrivées aux frontières, mais sur les flux de réfugiés que pourra contrôler le gouvernement, comme les quotas de l'UE ou les regroupements familiaux.

Outre la question migratoire, conservateurs, libéraux et verts s'opposent sur de nombreux sujets de fond, qu'il s'agisse de la réforme de l'Union européenne, de la transition énergétique, des finances publiques ou de l'évolution du secteur stratégique de l'automobile, en crise en raison de l'énorme scandale des émissions polluantes.

Tous ont cependant promis d'aborder les négociations de formation d'une majorité de manière constructive. Depuis les premières élections de 1949 dans l'Allemagne d'après-guerre, le parti vainqueur à toujours réussi à constituer un gouvernement.

Un échec de Mme Merkel, après douze ans au pouvoir, pourrait donner lieu à des législatives anticipées.