Les accusés associés à l'extrême-gauche ne seront pas jugés pour terrorisme.

En 2008, la ministre de l'Intérieur française, Michèle Alliot-Marie, avait présenté l'arrestation des « neuf de Tarnac » comme une réussite majeure des forces de l'ordre du pays dans leur lutte contre les pratiques terroristes d'un dangereux groupuscule d'extrême gauche.

Huit ans plus tard, la Chambre de l'instruction de la Cour d'appel de Paris vient de servir une douche froide à l'ex-politicienne et aux services policiers en cause en confirmant la nécessité de donner une portée autrement plus limitée à l'affaire.

Le tribunal a confirmé mardi qu'il était inapproprié d'associer une dimension terroriste aux agissements de membres du groupe qui sont toujours poursuivis, confirmant une ordonnance rendue l'été dernier par le juge d'instruction au dossier.

Le parquet général de Paris a annoncé hier qu'il tenterait de faire infirmer la décision par la Cour de cassation, suscitant l'ire des avocats des accusés.

Me Marie Dosé a déclaré notamment à l'Agence France-Presse que « l'acharnement » des autorités « relève de l'indécence et ridiculise toute l'institution judiciaire ».

ARRESTATIONS

L'affaire a débuté en novembre 2008 après que des barres de fer aient été posées sur les caténaires de quatre lignes de train à grande vitesse dans des régions isolées de France. L'initiative, inoffensive pour les passagers, paralyse des pans importants du réseau et compromet les déplacements de milliers de personnes.

L'attention des autorités se porte rapidement sur un groupe d'étudiants proches de l'extrême gauche qui vivent en Corrèze dans une ferme.

Un doctorant de 34 ans, Julien Coupat, est présenté comme leur maître à penser par la police, qui le soupçonne d'être l'auteur d'un ouvrage anonyme appelant à l'insurrection.

Lors d'une rafle largement médiatisée, les policiers arrêtent une vingtaine de personnes liées au groupe et en relâchent rapidement une dizaine. Les autres sont mis en examen notamment pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste ».

Les accusés nient toute malversation, se disant victimes d'un dérapage policier alimenté par les visées sécuritaires du gouvernement. Ils évoquent des anomalies importantes dans l'enquête à l'appui de leurs dires.

VICTIME D'« OBSESSIONS »

L'année dernière, le juge d'instruction au dossier a écarté toute référence au terrorisme en relevant notamment que les sabotages ciblant les trains à grande vitesse n'avaient aucunement « intimidé ou terrorisé » la population. Décision que la Chambre d'instruction de la Cour d'appel de Paris est venue confirmer cette semaine.

Lors d'un récent témoignage en justice, Julien Coupat s'est dit victime des « obsessions » de l'ex-ministre de l'Intérieur et des services de renseignements, qui étaient convaincus, selon lui, de l'émergence en France d'un « groupuscule radicalisé » s'acheminant « vers la constitution d'un réseau préterroriste international ».

« On est depuis le début face à une machine et on se défend comme on peut avec les moyens du bord », a-t-il affirmé en mars selon le journal Ouest France.

JULIEN COUPAT TOUJOURS DANS LA LIGNE DE MIRE

Bien que la portée terroriste de la procédure judiciaire ciblant Julien Coupat et certains de ses proches ait été écartée, l'activiste demeure résolument dans la ligne de mire des autorités policières françaises. Le magazine Le Point rapporte notamment dans une récente édition que la Direction générale de la sécurité intérieure s'inquiète de la présence de l'activiste lors de manifestations contre la réforme du Code du travail et lui reproche de contribuer à la diffusion d'un « message insurrectionnel » hors des sphères anarchistes.

Photo Thomas Samson, archives Agence France-Presse

L’activiste Julian Coupat demeure résolument dans la ligne de mire des autorités policières françaises.