Le premier ministre d'Irlande du Nord, l'unioniste Peter Robinson, a démissionné jeudi, sur fond de crise autour du démantèlement de l'Armée républicaine irlandaise (IRA), sans toutefois faire exploser le gouvernement de coalition.

Accusant le Sinn Fein, ex-branche politique de l'Armée républicaine irlandaise (IRA) d'être malhonnête en prétendant que le groupe paramilitaire n'existe plus, Peter Robinson avait appelé à l'ajournement de l'Assemblée régionale, mettant sa démission dans la balance.

En début d'après-midi, la commission parlementaire de l'Assemblée de cette région semi-autonome du Royaume-Uni s'est réunie et a rejeté sa demande d'ajournement.

«À la lumière de la décision des républicains (Sinn Fein), des nationalistes (SDLP) et de l'UUP (unionistes) de continuer comme si de rien n'était au sein de l'Assemblée, je me retire de mes fonctions de premier ministre et les autres ministres DUP vont démissionner avec effet immédiat à l'exception d'Arlene Foster», ministre des Finances, a dit Peter Robinson lors d'une conférence de presse.

Il a précisé que Mme Foster «restera en poste» et qu'elle le remplacerait en tant que «Première ministre temporaire» à la tête du gouvernement de coalition «pour s'assurer que les nationalistes et les républicains ne sont pas en mesure de prendre des décisions financières ou autres qui pourraient nuire à l'Irlande du Nord».

Il a également réitéré sa demande de voir l'assemblée régionale être suspendue par Londres -alternative à l'ajournement-, un souhait que la ministre britannique chargée de la province, Teresa Villiers, a rejeté.

Selon elle, la démission de Peter Robinson et de trois ministres de son parti unioniste démocrate (DUP) est «le signe d'une rupture des relations de travail au sein de l'exécutif».

Appel à un «retour à l'esprit» des accords de paix 

Le premier ministre David Cameron s'est déclaré «sérieusement préoccupé par la situation» et a appelé «l'ensemble des hommes politiques d'Irlande du Nord à travailler ensemble pour construire un meilleur avenir pour le pays».

«Tout en reconnaissant la gravité de la situation, le premier ministre a dit à M. Robinson que le gouvernement britannique ne croyait pas qu'il serait juste d'introduire maintenant une loi d'urgence afin de suspendre l'Assemblée», a précisé dans un communiqué un des porte-parole de M. Cameron en début de soirée.

Avant l'annonce de la démission de Robinson, le président du Sinn Fein, Gerry Adams, avait appelé le DUP à ne pas quitter le gouvernement.

«La décision de la commission parlementaire (de l'Assemblée: NDLR) est la réaffirmation démocratique très claire de l'intégrité de ces institutions et de la nécessité et de la volonté de ces institutions de continuer le travail pour lequel nous avons tous été élus», a affirmé Gerry Adams.

Les tensions au sein du gouvernement de coalition entre les anciens frères ennemis ne sont pas nouvelles, mais elles ont été exacerbées par le meurtre à la mi-août d'un ancien militant de l'IRA, Kevin McGuigan, dont le mode opératoire rappelle les assassinats punitifs commis par l'IRA.

Selon la police, une partie de l'organisation, qui avait annoncé en 2005 avoir définitivement déposé les armes, est «toujours largement en place», bien que ses activités soient liées au crime organisé et non au terrorisme.

La tension est encore montée d'un cran mercredi avec l'arrestation, dans le cadre de l'enquête sur ce meurtre, de trois hommes, dont le président du Sinn Fein en Irlande du Nord Bobby Storey. Ce dernier a été remis en liberté jeudi soir, a annoncé la police.

David Cameron a aussi appelé «à un retour à l'esprit» qui a conduit au processus de paix, a précisé son porte-parole.

Il a insisté sur «la nécessité d'intenses discussions entre les partis pour trouver les moyens de lutter contre tous les groupes paramilitaires».

L'accord de paix baptisé «Good Friday», signé le 10 avril 1998, avait mis un terme à trois décennies d'affrontements confessionnels ayant causé la mort de 3500 personnes en Irlande du Nord.