Confrontée à un afflux de migrants souhaitant se rendre en Europe occidentale par les Balkans, la Macédoine a décrété jeudi l'état d'urgence et annoncé le déploiement des forces armées dans la zone frontalière avec la Grèce pour aider les autorités locales à gérer la crise.

Les forces spéciales de police étaient déjà déployées dans l'après-midi dans une zone frontalière, près de la ville de Gevgelija (sud), que les migrants utilisent pour entrer illégalement en Macédoine, a constaté un photographe de l'AFP.

À cet endroit, situé à environ 1,5 km d'un poste-frontière, quelque 1500 personnes, dont des enfants et des femmes, étaient coincées dans un no man's land, par une très grande chaleur, et empêchées de franchir la frontière.

«La frontière n'est pas fermée, mais elle n'a jamais été ouverte non plus» pour les passages de groupes de migrants, a déclaré à l'AFP un porte-parole du ministère macédonien de l'Intérieur, Ivo Kotevski.

«Ils entraient toujours illégalement», a-t-il souligné.

Des milliers de migrants, notamment des réfugiés syriens, mais également des ressortissants somaliens, pakistanais, afghans ou encore irakiens, affluent ces derniers jours dans le sud de la Macédoine en provenance de la Grèce.

Ils espèrent monter à la gare ferroviaire de Gevgelija dans des trains et traverser, en direction du nord, la Macédoine, puis la Serbie, pour se rendre ensuite dans les pays de l'Union européenne.

Face à cette situation, le gouvernement macédonien a décrété jeudi l'état d'urgence, «en raison d'une pression accrue à la frontière sud et d'une migration intensifiée sur le corridor balkanique».

«Il a été estimé qu'un contrôle plus efficace était nécessaire dans la zone frontalière, où l'on enregistre des passages illégaux massifs en provenance de la Grèce», a indiqué le gouvernement dans un communiqué.

Depuis janvier, environ 160 000 migrants, en provenance surtout des zones de guerre en Syrie, en Afghanistan ou en Irak, sont arrivés sur des îles grecques d'Égée en provenance des côtes occidentales turques proches, selon le Haut Commissariat de l'ONU aux Réfugiés (HCR).

Même si la Grèce est un pays membre de l'UE, beaucoup de réfugiés souhaitent la quitter pour se rendre dans des pays d'Europe occidentale.

Capacités saturées

Le gouvernement macédonien a également décidé de déployer des forces armées dans la zone touchée, notamment sur quelque 50 kilomètres le long de la frontière avec la Grèce. L'armée sera aussi envoyée à la frontière avec la Serbie, dans le nord, et le long du corridor traversant le pays du sud au nord, qui est emprunté par les migrants.

Un quartier général a également été mis en place pour gérer cette situation.

Les militaires, dont le nombre n'a pas été précisé, seront engagés pour «renforcer la sécurité pour la population locale et encadrer la prise en charge des personnes qui ont l'intention de demander l'asile, conformément aux capacités» dont dispose le pays, lit-on dans le communiqué du gouvernement.

La Macédoine avait mis en garde mercredi contre une «situation alarmante» et lancé un appel aux pays voisins pour lui envoyer des wagons pour transporter les migrants vers le nord, ses propres capacités étant saturées.

Jeudi, Skopje a accusé les autorités grecques de diriger de façon organisée les migrants vers la Macédoine.

«Malheureusement, la Grèce, non seulement ne garde pas sa frontière, mais nous constatons nombre de cas de transfert organisé de migrants illégaux jusqu'à notre frontière», a déclaré M. Kotevski.

Le gouvernement grec avait affrété mercredi un traversier pour transférer des îles grecques quelque 2700 réfugiés syriens vers Thessalonique (nord), avec l'intention de les conduire ensuite dans des autocars à la frontière macédonienne.

Cette opération a failli provoquer un incident diplomatique entre les deux pays et le bateau a été finalement dirigé vers Athènes, a rapporté jeudi la presse grecque.