La décision du gouvernement socialiste en France de faire adopter sans vote une importante loi d'inspiration libérale sur des réformes économiques, qui divise son camp politique, a suscité mardi un vaste tollé à l'Assemblée nationale.

Dans un climat houleux, le premier ministre Manuel Valls a officialisé à la tribune de la Chambre basse son intention, révélée la veille, d'à nouveau engager la responsabilité de son gouvernement sur ce projet.

Le texte, sur lequel le gouvernement table pour relancer la croissance et démontrer à ses partenaires européens sa volonté de réformer, étend notamment le travail dominical et assouplit le Code du travail.

«Il faut avancer dans l'intérêt des Français. C'est impératif. La détermination de mon gouvernement à réformer est intacte», a-t-il martelé, défendant un «choix d'efficacité».

En signe de protestation, les députés de l'opposition de droite et de la gauche communiste ont quitté l'hémicycle.

«L'Assemblée a été humiliée», a cinglé Christian Jacob, patron des députés du parti Les Républicains (droite) de l'ancien président Nicolas Sarkozy, en fustigeant «l'interdiction des débats».

Très virulent, le chef de file des élus communistes, André Chassaigne, a accusé M. Valls d'être «en train de bafouer la démocratie dans ce pays».

Même son de cloche chez les anciens alliés écologistes du pouvoir, partis du gouvernement après la nomination de Manuel Valls à sa tête au printemps 2014, qui ont dénoncé un «déni de démocratie» et un «chantage».

Dans les rangs des députés du parti socialiste, majoritaire, le chef de file des «frondeurs» de l'aile gauche, Christian Paul, a critiqué «un échec collectif et une faute politique».

Sans surprise, l'opposition de droite, avec ses alliés centristes, a immédiatement déposé une motion de censure, qui sera débattue jeudi après-midi. Tous les experts la jugent cependant vouée à l'échec compte tenu de la majorité dont dispose le gouvernement.

M. Valls avait déjà engagé la responsabilité de son gouvernement en février pour faire passer en première lecture le même projet de loi, porté par le ministre de l'Économie Emmanuel Macron, un ancien banquier de 37 ans.

Le recours à l'article «49.3» de la Constitution lui avait permis d'étouffer l'opposition d'une trentaine de députés socialistes «frondeurs», qui jugent le texte trop libéral.

En vertu de cette procédure, dont l'usage autrefois courant est aujourd'hui très limité, la loi n'est pas soumise au vote et est considérée comme adoptée, sauf si une motion de censure est votée.

Les députés frondeurs n'étaient pas allés jusque là et la motion, soutenue seulement par la droite, avait été largement rejetée.

Celle qui sera débattue jeudi apparaît déjà promise au même sort. Les adversaires de la «loi Macron» dans les rangs socialistes ont souligné mardi que leur but n'était «pas de faire chuter le gouvernement».

Une fois adoptée à l'Assemblée, la loi repartira une nouvelle fois au Sénat, contrôlé par la droite, avant une adoption définitive que le président François Hollande a dit espérer avant le 14 juillet.

Le président du Medef, la principale organisation patronale française, a soutenu de son côté la décision du pouvoir d'utiliser l'arme institutionnelle pour imposer le texte, estimant que le gouvernement avait fait un «bon choix».

La loi Macron, censée selon le ministre de l'Économie «déverrouiller» l'économie française, a été infléchie ces derniers jours dans un sens encore plus favorable aux entreprises.

Le gouvernement s'est attiré les foudres des syndicats en y introduisant notamment un très controversé plafonnement des indemnités dues aux salariés en cas de licenciement abusif.