En quête d'une légitimité nouvelle après la grave crise gouvernementale de la rentrée, Manuel Valls sollicite mardi pour la deuxième fois en cinq mois un vote de confiance des députés, deux jours avant une très attendue conférence de presse de François Hollande.

Remaniement forcé pour évincer les ministres rebelles (Montebourg, Hamon, Filippetti), déballage embarrassant de l'ex-Première dame Valérie Trierweiler sur sa vie avec le président à l'Élysée, éviction de l'équipe «Valls 2» de Thomas Thévenoud, important dérapage des déficits publics 2014 et 2015, croissance atone... Le scénario improbable de la rentrée gouvernementale s'est jusque-là écrit de la plus noire des encres.

Mais sauf concordance malchanceuse, le premier ministre, lui aussi fragilisé par une rentrée catastrophique pour l'exécutif, devrait obtenir sans trop de heurts ce vote favorable. Manuel Valls n'a «aucun doute» sur ce point, a-t-il d'ailleurs répété à de nombreuses reprises ces derniers jours. Au point qu'il ne veut pas devoir compter sur la voix de M. Thévenoud, redevenu député, mais aussitôt exclu du groupe socialiste et décidé à s'accrocher à son siège.

«Ce qui est en jeu, c'est la capacité de la gauche à gouverner, cette gauche de gouvernement qui assume les responsabilités, qui met les mains dans le cambouis, qui se retrousse les manches», a plaidé le premier ministre jeudi, promettant un discours de «rassemblement».

Le premier ministre aura bien besoin de rassembler un maximum son camp pour s'éviter des sueurs froides. Avec l'UMP et apparentés (199 sièges), l'UDI (30 sièges) les élus du Front de gauche (10) et la plupart des 8 non inscrits (dont les 2 FN), ce bloc peut espérer quelque 260 voix, à condition d'en grappiller parmi celles des 18 écologistes, qui ne se prononceront que mardi sur leurs intentions.

Du côté de la majorité, les «frondeurs» du groupe PS ne devraient pas nourrir le vote contre et ont annoncé aller vers une «abstention collective». Mais combien seront-ils à faire ce choix?

Réponse mardi vers 19h00 ou 20H00, après le discours du premier ministre 15h00, les orateurs des différents groupes, puis le vote lui-même 18H30.

Avec 289 sièges dans le groupe socialiste et le soutien bien engagé des députés radicaux (17 voix, un «diamant gros comme le Ritz» selon leur chef de file Roger-Gérard Schwartzenberg), il faudrait autour d'une cinquantaine d'abstentions frondeuses pour atteindre la «cote d'alerte» qu'on se fixe à Matignon.

Sarkozy comme dérivatif

«Ce qui est clair c'est que ça va être difficile, mais on travaille avec acharnement. Il faut aller chercher la majorité au coeur des députés socialistes», glisse-t-on dans l'entourage du premier ministre.

Lors du premier vote de confiance le 8 avril, ils n'étaient que 11 socialistes à s'abstenir. Le 29 avril, sur le programme de stabilité budgétaire 2014-2017, un record de 41 abstentions PS avait été enregistré. Le 8 juillet, la fronde s'était érodée à 33 frondeurs.

Possible nouvelle source de tensions avec l'aile gauche: du fait de la faible inflation, le gouvernement a finalement annoncé vendredi la non-revalorisation des petites retraites.

Mais les frondeurs, qui se défendent de vouloir faire chuter le gouvernement, semblent déjà dans l'après: «le vote de la semaine prochaine c'est un temps fort, mais il y en aura d'autres à l'automne, le vote du budget, celui de la Sécurité sociale, et à chaque fois nous ferons entendre notre voix», souligne Christian Paul (Nièvre).

Lundi après-midi - en présence de M. Valls - et mardi matin, un «séminaire» réunit gouvernement et députés PS. «Le type de lieu où il faut avoir les débats», souligne un ténor socialiste. Sous-entendu: pas dans l'hémicycle.

«Trop de souffrance, pas assez d'espérance»: tels avaient été les premiers mots pour qualifier la France d'un Manuel Valls très applaudi lors de son premier vote de confiance.

Cinq mois plus tard, sans avoir obtenu de résultat économique ou social probant, le premier ministre peut difficilement faire un autre diagnostic, même s'il a promis, en dénonçant le «France bashing», qu'il y aurait de «l'optimisme».

Face à des sondages désastreux (13% d'opinions favorables selon un des instituts, le plus bas pour un président de la République), François Hollande, qui tient jeudi sa quatrième grande conférence de presse semestrielle, a voulu afficher son rôle à l'international. Il s'est rendu vendredi à Bagdad et préside à Paris un sommet international consacré à l'Irak.

Dans cette avalanche de mauvaises nouvelles, le retour annoncé de l'ex-président Sarkozy, qui devrait se concrétiser d'ici la fin de la semaine, pourrait paradoxalement permettre aux socialistes de souffler un peu, en braquant les projecteurs ailleurs que sur les difficultés du gouvernement.