Désemparées, les autorités britanniques demandent aux femmes musulmanes de convaincre leurs maris et leurs fils de ne pas aller combattre en Syrie. Londres craint en effet le retour au pays de ces centaines de Britanniques qui pourraient avoir été embrigadés par des islamistes lors de leur lutte contre le régime de Bachar al-Assad.

Q: Que demandent les autorités britanniques aux musulmanes vivant au Royaume-Uni?

R: Des responsables de la lutte antiterroriste et de la lutte contre l'extrémisme ainsi que des femmes musulmanes de groupes communautaires se sont réunis jeudi à Londres, Manchester et Birmingham. Les autorités veulent que ces femmes découragent leurs fils et leurs maris de s'engager militairement en Syrie contre le régime de Bachar al-Assad. Des prospectus expliquant les risques encourus sont distribués.

Q: Que craignent les autorités britanniques?

R: En novembre dernier, le responsable de l'entité chargée du terrorisme au sein de Scotland Yard, Richard Walton, avait expliqué que «des centaines de personnes vont en Syrie. S'ils n'y sont pas tués, ils sont radicalisés. Vous avez des jeunes de 16 et 17 ans qui partent pour combattre. Une mère est partie récupérer son fils de 16 ans qui avait quitté pour se battre. C'est sérieux, et même pire que jamais. Et nous attendons l'impact de leur retour au Royaume-Uni». Jamais la menace terroriste islamiste n'avait été aussi clairement énoncée par un officiel responsable de la sécurité du Royaume-Uni, cette tâche étant jusqu'alors réservée aux responsables politiques. Selon les services secrets, un millier d'Occidentaux combattraient en Syrie contre le régime de Bachar al-Assad. Les Britanniques seraient les plus nombreux parmi ces Occidentaux.

Q: Les autorités ont-elles déployé un plan d'action pour empêcher la radicalisation des musulmans vivant au Royaume-Uni?

R: Après les attentats du 7 juillet 2005, lors desquels des musulmans radicalisés ont tué 52 personnes, l'ancien premier ministre Tony Blair a mis en place une stratégie visant à arrêter la propagation d'idéologies extrémistes, à identifier les personnes vulnérables avant leur radicalisation et à les aider à trouver une place dans la société.

Q: Quel a été son bilan?

R: Il est très mitigé. Les autorités annoncent régulièrement l'arrestation d'apprentis terroristes et le démantèlement de petits réseaux. Mais le meurtre d'un soldat commis l'an dernier dans le quartier londonien de Woolwich par deux jeunes islamistes résume le principal défi de cette stratégie: comment repérer des personnes radicalisées de manière autonome?

Q: D'autres tactiques ont-elles été mises en place?

R: Londres a expliqué il y a plusieurs mois que toute personne de retour de Syrie pourrait être interrogée et arrêtée dès son entrée sur le sol britannique. Plusieurs arrestations ont, depuis, été effectuées. Parallèlement, grâce à une loi de 2006, le gouvernement peut retirer la citoyenneté britannique à toutes les personnes possédant une double nationalité et présentant un risque pour le pays. Ce n'est pas tout: depuis 2010, la ministre de l'Intérieur Teresa May a fait annuler la citoyenneté britannique d'au moins 16 individus partis à l'étranger, dont certains sont nés au Royaume-Uni (et sont donc devenus apatrides). La Cour suprême du pays a, depuis, déclaré cette mesure illégale, mais les individus en question n'ont pas pu redevenir citoyens britanniquesé