L'ancien président français Nicolas Sarkozy, inculpé dans l'affaire Bettencourt, devra encore attendre pour savoir s'il sera renvoyé ou non devant un tribunal, après le rejet mardi de requêtes en nullité présentées par la défense.

La cour d'appel de Bordeaux (sud-ouest) a validé mardi matin l'essentiel de la procédure concernant les abus de faiblesse commis au détriment de Liliane Bettencourt, la richissime héritière du géant des cosmétiques L'Oréal, volet dans lequel M. Sarklozy a été mis en examen (inculpé) le 21 mars.

L'ancien président est soupçonné d'avoir bénéficié des largesses de Mme Bettencourt pour financer sa campagne électorale de 2007, alors que selon une expertise médicale, la vieille dame, aujourd'hui âgée de 90 ans, souffre de sénilité depuis septembre 2006.

«La chambre de l'instruction vient de rendre sa décision et valide dans son intégralité la procédure», a déclaré à des journalistes Me Huc-Morel, avocat de la fille de Liliane Bettencourt, après avoir pris connaissance de la décision de la cour d'appel.

Il a ajouté que la chambre de l'instruction avait notamment validé l'expertise médicale de l'héritière de L'Oréal, au coeur du dossier et sur laquelle reposent en grande partie les douze mises en examen dans ce dossier, y compris celle de l'ancien président de la République.

Les avocats contestaient la validité de cette expertise au motif notamment qu'elle avait été réalisée sous la direction d'une légiste, proche du principal juge responsable de l'affaire, Jean-Michel Gentil, dont elle était le témoin de mariage.

Mardi, la cour a uniquement invalidé des écoutes de conversations entre Patrice de Maistre, ex-gestionnaire de fortune de Mme Bettencourt et son avocate, et des procès-verbaux de garde à vue de Carlos Cassina Vejarano, ancien gestionnaire d'une île des Seychelles ayant appartenu à la milliardaire, a précisé à l'AFP Me Arnaud Dupin, un autre avocat de la famille Bettencourt.

Acharnement

Reste toutefois une dernière menace sur cette instruction délicate, avec une demande de récusation des juges déposée par deux des mis en examen, François-Marie Banier, artiste ami de Mme Bettencourt, et Patrice de Maistre, son ancien gestionnaire de fortune.

Leur demande porte également en grande partie sur les liens entre le juge et l'experte médicale. Là encore, les conséquences d'une récusation seraient un délai très long avant la conclusion du dossier par de nouveaux juges.

À l'inverse, si les juges sont confirmés par la cour d'appel, ils pourraient rendre dans les prochaines semaines leur ordonnance de règlement, c'est-à-dire indiquer quelles personnes parmi les mis en examen doivent bénéficier d'un non-lieu et lesquelles doivent être renvoyées en correctionnelle.

Le 28 juin, le parquet de Bordeaux avait requis six non-lieux, considérant notamment «qu'aucune charge» ne pèse contre Nicolas Sarkozy et son ancien trésorier de campagne, l'ex-ministre français du Budget Éric Woerth. Il a en revanche requis le renvoi de l'autre moitié des protagonistes, dont l'artiste François-Marie Banier, et M. De Maistre.

Selon le Canard Enchaîné, le juge Jean-Michel Gentil s'apprêterait à accorder un non-lieu à l'ex-président de la République.

Mardi matin, l'avocat de M. Sarkozy n'était pas joignable. Une des proches de l'ancien chef de l'État, l'ex-ministre Nadine Morano, s'est dite pour sa part convaincue qu'il se pourvoirait en cassation contre la décision de la cour d'appel et a une nouvelle fois mis en cause l'impartialité des juges.

À la question de savoir si la décision de mardi compliquait le retour en politique de l'ancien chef de l'État, Nadine Morano a répondu : «Je ne crois pas, parce que (...) l'acharnement est tel».

Elle a assuré croire en la «probité» de Nicolas Sarkozy. «Il pourrait vivre tranquille, mais vu la situation de la France aujourd'hui je n'espère qu'une chose, c'est qu'il s'engage à revenir», a-t-elle encore dit.

En retrait de la vie politique depuis sa défaite face à François Hollande en 2012, Nicolas Sarkozy reste de loin le candidat préféré des sympathisants de l'UMP, premier parti de la droite française, pour la présidentielle de 2017, 62 % d'entre eux réclamant son retour alors que leur parti se débat dans d'incessantes querelles internes.