La Lituanie a marqué lundi le 70e anniversaire de la liquidation par l'Allemagne nazie du ghetto juif de Vilnius et d'une fin quasi totale de la riche culture juive de la ville, surnommée autrefois «la Jérusalem du Nord».

Des drapeaux nationaux frappés de rubans noirs en signe de deuil ont été hissés sur les bâtiments publics dans la capitale lituanienne, alors que les dirigeants du pays et des survivants de l'Holocauste ont assisté à une cérémonie en hommage aux dizaines de milliers de personnes qui ont péri.

«La triste et terrible réalité ne peut jamais appartenir au passé, elle doit rester gravée dans notre mémoire», a déclaré pendant la cérémonie la présidente lituanienne Dalia Grybauskaite.

La communauté juive de Lituanie comptait avant la guerre plus de 200 000 personnes. Plus de 90% d'entre elles périrent des mains des nazis et de leurs collaborateurs locaux, durant l'occupation allemande de 1941 à 1944.

À Vilnius, les 70 000 juifs constituaient avant la guerre un tiers de la population de la ville, centre important de la culture yiddish.

Mme Grybauskaite a salué lundi ceux des Lituaniens qui avaient sauvé des juifs pendant l'Holocauste, «des icônes de l'humanité et des modèles pour nous».

L'institut Yad Vashem de Jérusalem a décerné à plus de 800 Lituaniens le titre de «Juste parmi les Nations», pour avoir hébergé et sauvé leurs voisins juifs des persécutions nazies.

Seuls quelque 5000 juifs vivent aujourd'hui dans ce pays balte de 3 millions d'habitants, ancienne république soviétique devenue membre de l'Union européenne en 2004.

Des membres de la petite communauté se sont rassemblés lundi dans l'unique synagogue de Vilnius, la seule parmi une centaine à avoir survécu à la Seconde Guerre mondiale, pour y lire les noms des victimes du ghetto.

Fania Brantsovskaya, 91 ans, se souvient comment elle s'en est échappée le 23 septembre 1943.

«Tout s'est fait en cinq minutes. Au moment où nous quittions le ghetto, j'ai vu des militaires arriver. Mais nous n'avons pas pensé à l'époque que ce serait la liquidation», déclare-t-elle à l'AFP.

Mme Brantsovskaya a lu les noms de son frère, de sa mère et de sa soeur. Elle a dit être l'une des cinq rescapés du ghetto résidant aujourd'hui à Vilnius.

D'autres vivent à l'étranger, comme Simon F. Malkes, résidant en France depuis 1950 et venu à Vilnius pour les cérémonies d'anniversaire.

Âgé aujourd'hui de 86 ans, il a survécu caché pendant 48 heures dans la cave d'un camp de travail nazi où il avait été transféré quelques semaines seulement avant la liquidation du ghetto.

«La cachette a été construite par mon père et quelques amis. Elle a été faite pour 12 à 15 personnes. À la fin, nous y étions 37. On n'avait pas d'air pour respirer, pas d'eau, c'était horrible», confie-t-il à l'AFP, larmes aux yeux.

Il s'est ensuite caché dans un champ de maïs, puis dans un hôpital, jusqu'à l'arrivée des Soviétiques qui chassèrent les nazis des pays baltes en juillet 1944.