Près de 600 enfants en Albanie n'iront pas à l'école à la rentrée scolaire lundi, car ils vivent retranchés chez eux pour échapper à la vendetta, «la vengeance (des crimes de sang) par le sang», a déclaré à l'AFP Gjin Marku, un responsable d'une ONG locale.

Cinq cent quatre-vingt-dix enfants, âgés de 3 à 15 ans, seront obligés de rester enfermés dans leurs foyers, dans l'espoir d'échapper aux effets de cette loi fixée au XVe siècle, qui réclame systématiquement la «vengeance du sang par le sang», selon la même source. Cette loi est issue du Kanun, un code coutumier qui se prononce sur une douzaine de domaines de la vie quotidienne.

Aux termes de cette loi, tous les membres masculins d'une famille, y compris un bébé de quelques mois, sont susceptibles d'être victime d'une vengeance, quel que soit leur degré de parenté avec le meurtrier ayant tué un membre d'une famille «rivale».

Cette tradition meurtrière touche surtout les régions montagneuses dans le nord de l'Albanie, mais elle est également répandue dans les villes, le centre et le sud du pays.

Selon un rapport du «Comité de réconciliation», diffusé début septembre à Tirana, 600 femmes et 590 enfants vivent enfermés dans leurs foyers craignant d'être tués dans le cadre d'une vengeance.

«La plupart de ces enfants sont privés de tout moyen de communication, ils ne peuvent pas se rendre à l'école à cause de leur isolement», a expliqué M. Marku.

Les autorités albanaises chargées de l'Éducation avaient mis en place l'année dernière des projets d'éducation individuelle au foyer pour chacun des enfants vivant retranchés à domicile.

«Nous allons continuer à assister ces enfants, mais notre but est de les faire sortir pour qu'ils puissent aller et suivre les cours comme tous les autres à l'école», a déclaré lundi à la presse la nouvelle ministre de l'Éducation, Mme Lindita Nikolli.

Le nouveau gouvernement du premier ministre Edi Rama, investi dimanche, entend appliquer les lois à la lettre et mettre en oeuvre des plans d'action ciblés dans l'espoir de mettre fin à cette situation, a ajouté la ministre.