La Marocaine Karima El Mahroug, alias «Ruby», a raconté vendredi à Milan ses soirées dans la résidence privée de Silvio Berlusconi, en témoignant au procès de proches du Cavaliere, accusés d'avoir constitué un réseau de prostitution à son profit.

La jeune femme est au coeur de ce procès et d'un autre visant directement M. Berlusconi jugé depuis avril 2011 à Milan pour avoir rémunéré des prestations sexuelles de Ruby quand elle était mineure et pour avoir fait pression sur la préfecture de Milan pour la libérer après son interpellation en mai 2010 pour un larcin.

«Ruby la voleuse de coeurs» est arrivée accompagnée de son compagnon Luca Risso et de ses deux avocates, Paola Boccardi et Daniela Damiano, convoquée comme témoin dans le jugement de trois amis de M. Berlusconi : l'agent de starlettes Lele Mora, Emilio Fede, un ex-présentateur télévisé vedette de la chaîne Retequattro appartenant à Silvio Berlusconi, et Nicole Minetti, ancienne hygiéniste dentaire du Cavaliere et ex-conseillère régionale à Milan, jugés pour incitation à la prostitution de mineures et majeures.

Interrogée par la présidente Annamaria Gatto, Ruby, a raconté comment les dîners à Arcore, dans la somptueuse résidence privée de Silvio Berlusconi aux alentours de Milan, se prolongeaient dans un sous-sol où se trouvait «la salle du bunga bunga, avec un pilier pour le lap dance», selon la bande son de l'interrogatoire diffusée en direct par la chaîne en continu Sky TG24.

Elle a décrit des «danses sensuelles» des «jeunes femmes présentes» avec des imitations du président Barack Obama ou de la juge Ilda Boccassini, bête noire de Berlusconi, et un strip-tease de Nicole Minetti, déguisée en religieuse.

Mais elle a dit «n'avoir jamais vu de contacts physiques» entre les jeunes femmes et le Cavaliere. Elle a aussi confirmé avoir dormi parfois à Arcore, mais «toute seule dans une chambre».

Au cours de l'audition, qui se poursuivait à 11 h 20 GMT (7 h 20 à Montréal), elle a aussi raconté son arrivée à Milan en octobre 2009 depuis la Sicile et son «rêve d'entrer dans le monde du spectacle». Au fil de soirées en discothèques et rencontres, la jeune fille entre en contact avec l'agence de Lele Mora, à qui elle affirme avoir 19 ans alors qu'elle est encore mineure.

Selon elle, c'est l'imprésario qui l'appelle un jour pour participer à une soirée et lui envoie une voiture avec chauffeur qui l'emmène à Arcore.

«Quand je suis arrivée, je n'en croyais pas mes yeux», a dit Ruby à propos de sa première soirée chez Berlusconi, en février 2010. Elle a raconté un dîner fastueux où elle se serait présentée comme «la fille d'une chanteuse mi-brésilienne mi-égyptienne» et comme membre «de la famille» du président égyptien Moubarak et aurait ému l'assistance en disant avoir été maltraitée par un oncle «parce qu'elle voulait se convertir au catholicisme». En repartant «tard dans la nuit» après un dîner ponctué «de chants et discussions», elle a dit avoir reçu «de Silvio Berlusconi une enveloppe avec 2 à 3000 euros (2600 à 4000 $), pour l'aider».

La première soirée a été suivie, selon elle, de «5, 6 ou 7 autres» à l'issue desquelles elle recevait à chaque fois du Cavaliere «des enveloppes avec 2000 euros en billets de 500 euros».

C'est la première fois que la jeune femme est entendue par le tribunal, les juges ayant finalement renoncé à l'entendre dans le cadre du procès de l'ex-chef du gouvernement.