Ratko Mladic a été placé dans un centre de détention des Nations unies, mardi, en attendant sa comparution devant la justice pour répondre à des accusations de génocide, notamment.

Nerma Jelacic, porte-parole du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) à La Haye, aux Pays-Bas, a indiqué que des membres du personnel de la cour avaient remis l'acte d'accusation à Mladic et lui avaient expliqué les règles et les procédures avant de le placer dans une cellule d'isolement pour la nuit.

Mme Jelacic a expliqué qu'un tel isolement était la procédure habituelle pour les nouveaux détenus.

Mladic a en outre reçu une liste d'avocats qui pourraient l'aider au cours des premières étapes devant le TPIY, où il devra répondre à des accusations de génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre.

Mme Jelacic a précisé que Mladic serait examiné par un médecin et recevrait tout traitement dont il pourrait avoir besoin avant la fin de la journée.

La date de la première comparution en cour de Mladic n'a pas encore été fixée, mais cette étape devrait avoir lieu d'ici quelques jours. L'accusé devra alors confirmer son identité. Mladic devra également inscrire une déclaration de culpabilité ou de non-culpabilité pour chacun des 11 chefs d'accusation ayant été déposés contre lui. Le tribunal lui demandera en outre de mentionner toute plainte concernant sa détention.

Un peu plus tôt durant la journée de mardi, la Serbie avait extradé Mladic. Quelques heures auparavant, l'ancien chef militaire des Serbes de Bosnie avait vu son appel contre son transfert vers le TPIY être rejeté.

Lors d'une conférence de presse convoquée au cours de l'après-midi, la ministre serbe de la Justice, Snezana Malovic, avait annoncé que l'ancien général, arrêté jeudi dernier en Serbie après 16 ans de cavale, allait être transféré par avion vers les Pays-Bas. Quelques heures plus tard, l'avion transportant Mladic a atterri à l'aéroport de Rotterdam.

«Mladic est accusé des plus graves crimes contre l'humanité et des plus graves violations du droit humanitaire international, a souligné Mme Malovic. En remettant Mladic à La Haye, la Serbie remplit une obligation internationale et morale.»

Un peu plus tôt, le vice-procureur serbe chargé des crimes de guerre, Bruno Vekaric, avait annoncé que l'appel interjeté par Mladic, lundi, contre son extradition avait été rejeté par un tribunal de Belgrade. La juridiction a pris sa décision quelques heures après avoir reçu la requête, envoyée par courrier, dans laquelle la défense affirmait que l'accusé, âgé de 69 ans, n'était pas apte à être jugé.

En plus de l'appel, l'avocat de Mladic, Milos Saljic, avait demandé qu'une équipe de médecins examine son client, qui aurait subi deux accidents vasculaires cérébraux durant sa cavale.

Mais le tribunal serbe a invoqué ce qu'il estime être des manoeuvres dilatoires, soulignant que des médecins ayant examiné Mladic l'avaient jugé apte à être traduit en justice.

En début de matinée, Mladic a été autorisé à se rendre sur la tombe de sa fille, Ana, qui s'est suicidée en 1994, à l'âge de 23 ans, avec l'arme de son père. À l'époque, des médias avaient affirmé qu'elle était dépressive en raison du rôle joué par son père dans le conflit. Mladic, lui, a toujours affirmé qu'elle avait été tuée par ses ennemis.

L'ancien général s'est rendu au cimetière où sa fille est enterrée, en banlieue de Belgrade, avec un convoi de véhicules blindés sous haute sécurité. Il a déposé un cierge et un bouquet de fleurs sur la sépulture.

«Nous n'avons pas annoncé sa visite en raison de son caractère privé, et parce qu'elle représentait un risque pour la sécurité, a expliqué M. Vekaric. L'ensemble de l'opération a duré 22 minutes exactement et s'est déroulé sans accroc. (Ratko Mladic) est resté sur la tombe quelques minutes.»

Milos Saljic, qui a rendu visite à Mladic dans sa cellule en début d'après-midi, a raconté que l'ancien général pleurait et était très ému durant ce qu'il a présenté comme une visite d'adieu de son épouse et de sa soeur. Elles lui ont apporté une grande valise contenant les vêtements dont il aura besoin à La Haye, a-t-il précisé.

Ratko Mladic est est accusé de génocide, de complicité de génocide, de persécutions, d'extermination, de déportation, de crimes contre l'humanité et de violations des lois et coutumes de guerre pour des faits commis durant la guerre en Bosnie (1992-95). Il risque la prison à vie. Il est notamment mis en cause pour le massacre de 8000 hommes et garçons musulmans dans l'enclave de Srebrenica, en juillet 1995, et pour le siège de Sarajevo.

En Bosnie, des milliers de partisans de Ratko Mladic ont manifesté, mardi, à Banja Luka, capitale de l'entité des Serbes de Bosnie, contre l'arrestation de l'ancien général, scandant son nom et brandissant son portrait.