La chef de la diplomatie américaine, Hillary Clinton, a appelé mardi les Bosniens à «trouver un second souffle» pour dépasser leurs querelles communautaires et avancer vers l'Europe, au premier jour d'une tournée dans les Balkans.

Quinze ans après les accords de paix de Dayton (États-Unis), en 1995, «l'esprit de coopération n'a pas pris racine» entre les communautés musulmane, serbe et croate de Bosnie, a-t-elle déploré lors d'une rencontre avec quelques centaines d'étudiants au théâtre national de Sarajevo.

Elle a invité à cet effet les dirigeants du pays «à prendre leurs responsabilités» pour permettre au pays d'aller de l'avant.

La Bosnie, née des accords de Dayton, est bloquée dans ses réformes depuis quatre ans en raison des divergences inter-communautaires sur l'avenir de l'État central.

«Les gens peuvent se rendre en sécurité à leur travail chaque jour, mais il n'y a pas assez d'emplois», a souligné la secrétaire d'État. «Les haines ont reculé mais le nationalisme persiste. Et ce que représente l'intégration à l'Europe, la promesse d'une plus grande stabilité et davantage d'opportunités, demeure hors de portée».

«Il faut trouver un second souffle. Il faut que les gens ne se découragent pas, n'acceptent pas le statu quo et ne se replient pas dans leurs communautés», a-t-elle poursuivi.

Les Bosniens des trois communautés doivent «renforcer les institutions démocratiques, approfondir la paix entre voisins et créer les conditions d'un progrès politique, économique et social sur le long terme», a-t-elle réclamé.

Les États-Unis feront leur possible pour soutenir cet effort, a-t-elle promis, rappelant que Washington fournissait à la Bosnie une aide d'environ 300 millions de dollars par an.

Mais faute d'accomplir les réformes, a-t-elle averti, la Bosnie risque de tomber «en panne» et de manquer le coche de l'Union européenne et de l'Otan, c'est-à-dire «le meilleur moyen d'arriver à une croissance durable et à la stabilité politique à long terme».

Mme Clinton a dit avoir relayé «franchement» ce message aux membres de la présidence collégiale de Bosnie sortante, rencontrés mardi matin, ajoutant qu'elle espérait que l'arrivée d'un nouveau gouvernement central bosnien à Sarajevo permettrait des progrès.

Elle s'est entretenue à ce sujet avec le nouvel élu musulman modéré Bakir Izetbegovic, et a rencontré Milorad Dodik, à peine élu à la présidence de la Republika Srpska (RS), l'entité serbe de Bosnie. Les deux hommes avaient accepté une invitation à une réception à l'ambassade des États-Unis.

«La pression extérieure a un rôle à jouer», a souligné Mme Clinton, mais «au bout du compte, les peuples doivent régler les problèmes eux-mêmes».

Un an après la visite du vice-président américain Joe Biden, Hillary Clinton ne s'est pas présentée dans les Balkans avec de nouvelles propositions.

Mais la venue de la secrétaire d'État semblait bien perçue à Sarajevo, où le journal Oslobodjenje décrivait mardi la Bosnie actuelle comme «un enfant américain, le plus grand succès diplomatique» de Bill Clinton, son époux, président des États-Unis de 1993 à 2001.

Hillary Clinton a d'ailleurs pu mesurer sa popularité en se rendant à pied du palais présidentiel au théâtre national, applaudie le long du parcours par des passants.

«Elle n'a pas de baguette magique, mais elle arrive au bon moment» alors que «les citoyens ont voté pour le changement», soulignait Oslobodjenje.

Mme Clinton, qui devait se rendre à Belgrade dans l'après-midi, a souligné que la réconciliation est un enjeu commun à tous les Balkans. Elle a déjà appelé la Serbie et le Kosovo à «engager un dialogue sincère et créatif pour résoudre leurs différends».

Ce dialogue à venir, soutenu par l'Union européenne, doit être le premier depuis la proclamation d'indépendance du Kosovo, que Belgrade ne reconnaît pas.

Mme Clinton est attendue mercredi à Pristina.