L'action des soldats britanniques au cours du «Bloody Sunday», qui désigne la mort de 14 catholiques dans la répression le 30 janvier 1972 d'une manifestation à Londonderry (Irlande du Nord), n'était «ni justifiée ni justifiable», a estimé mardi le premier ministre David Cameron.

«Ce qui s'est passé le jour du Bloody Sunday était non justifié et non justifiable. C'était mal», a déclaré M. Cameron devant la chambre des Communes, chambre basse du Parlement, en annonçant les conclusions de l'enquête publique sur le «Dimanche sanglant».

La responsabilité du drame incombe aux soldats qui «ont perdu le contrôle d'eux-mêmes», a expliqué M. Cameron. «Au nom du pays, je suis profondément, profondément désolé», a déclaré le chef du gouvernement.

Son discours, retransmis en direct à Londonderry, a soulevé des hourras d'enthousiasme parmi le millier de personnes regroupées devant l'écran géant diffusant l'intervention du chef du gouvernement.

«Ce qui s'est passé n'aurait jamais dû se passer», a ajouté M. Cameron dans un discours au ton étonnamment dur. «Le gouvernement est l'ultime responsable de la conduite des forces armées», a-t-il lâché.

«Je n'ai jamais eu pour intention de remettre en question le comportement de nos soldats», mais les conclusions du rapport Saville, du nom du président de la commission d'enquête Mark Saville, sont «absolument claires», a reconnu le premier ministre conservateur. «Il n'y a aucun doute, aucune équivoque, aucune ambiguïté», a-t-il asséné.

L'enquête publique a conclu que les treize catholiques tués le jour-même, et un quatorzième mort plusieurs mois plus tard, «n'étaient pas armés», a annoncé M. Cameron. Une précédente enquête, effectuée très rapidement après les événements, avaient exonéré l'armée et assuré que les soldats avaient rétorqué à des manifestants séparatistes proches de l'IRA (Armée républicaine irlandaise) qui faisaient feu sur eux.

«Il y a eu des coups de feu tirés par des paramilitaires républicains, mais aucun d'entre eux ne justifiait d'abattre des civils», a ajouté M. Cameron.

Le rapport, diffusé après le discours de M. Cameron, a conclu qu'aucune des victimes «ne représentait une menace de mort ou risquait de provoquer des blessures graves». «Le Bloody Sunday était une tragédie ... et une catastrophe pour la population d'Irlande du Nord», ajoute le texte de 5 000 pages.

«Ce qui s'est passé, le Bloody Sunday a renforcé l'IRA Provisoire, accru le ressentiment nationaliste et l'hostilité envers l'armée et exacerbé le conflit violent les années qui ont suivi», poursuit le rapport.

À Londonderry, les familles des victimes se sont succédé sur un podium installé devant la mairie où le rapport a été remis simultanément, pour se féliciter des conclusions de l'enquête publique la plus longue et la plus coûteuse de l'histoire britannique.

«Innocent», ont-ils répété au nom de chacune des victimes, sous les applaudissements fervents.