À quelques semaines de législatives qui s'annoncent difficiles pour lui, le Parti travailliste a suspendu trois anciens ministres, accusés d'avoir monnayé leurs services de lobbying, dans l'espoir de désamorcer un nouveau scandale éclaboussant des députés britanniques.

L'ex-secrétaire d'État aux Transports, Stephen Byers, les anciens ministres Geoff Hoon et Patricia Hewitt, ainsi que la parlementaire Margaret Moran ont été suspendus dans l'attente des conclusions d'une enquête interne au sein du groupe parlementaire du Labour, a annoncé le parti lundi soir.

Un journaliste se faisant passer pour un représentant d'une entreprise fictive a filmé à leur insu des rencontres avec plusieurs parlementaires du Labour, apparemment prêts à utiliser leurs relations avec le gouvernement pour influer sur certaines mesures, en échange d'une rétribution.

Dans les images en caméra cachée diffusées lundi soir par la chaîne Channel 4, Stephen Byers déclare: «je suis à vendre», et se vante d'avoir déjà conclu des accords secrets, énonçant des tarifs allant jusqu'à 5.000 livres par jour (5.500 euros) pour ses services.

Les députés concernés ont nié toute malversation. M. Byers a demandé lundi à l'organisme de surveillance du Parlement d'enquêter: «Je ne doute pas qu'il confirmera que j'ai respecté le code de conduite des parlementaires».

Le premier ministre Gordon Brown a une nouvelle fois écarté mardi le lancement d'une enquête gouvernementale. Harriet Harman, numéro deux du Labour, avait indiqué lundi qu'une enquête interne au Parlement n'avait révélé aucune violation des règles parlementaires.

Mardi matin à la radio BBC 4, le ministre de la Justice, Jack Straw, a assuré qu'il n'y avait «pas la moindre preuve ou le moindre soupçon de preuve concernant une incorrection quelconque» mais admis que ce nouveau scandale «avait jeté le discrédit» sur le Labour et le Parlement.

David Cameron, leader de l'opposition conservatrice, a appelé mardi Gordon Brown à «repenser» son refus d'une enquête gouvernementale après des révélations qu'il a qualifiées de «choquantes».

Les sondages donnent les Tories gagnants aux législatives attendues pour le 6 mai mais leur avance en voix serait si ténue que M. Cameron pourrait ne pas réussir à réunir une majorité absolue de députés.

La suspension des membres du Labour intervient au moment où éclate un autre scandale. Selon une enquête diffusée mardi par la BBC, plus de vingt députés, de tous bords politiques, ont violé «à plus de 400 occasions» les règles concernant les voyages payés par des gouvernements étrangers. La BBC cite par exemple un séjour, non déclaré au Parlement, effectué aux Maldives par un député britannique où il dit avoir eu «un avant-goût de paradis».

Ces scandales font suite à une retentissante affaire dite des «notes de frais». Elle a éclaboussé l'an dernier plus de la moitié des députés qui ont réclamé au total plus d'un million d'euros en jouant avec un système laxiste de défraiement.

Les élus se sont ainsi fait rembourser des boîtes d'allumettes, de la nourriture pour chien et un abri flottant pour canards. Plusieurs ont été indemnisés pour des prêts immobiliers inexistants ou des résidences secondaires qu'ils n'occupaient pas. Certains élus font l'objet d'une enquête policière tandis que le système de défraiement fait l'objet d'une réforme.

Evoquant cette affaire, The Times écrit dans un éditorial: «lors de ce dernier scandale, nos représentants ont été incroyablement lents à reconnaître l'ampleur du mécontentement de la population... Vont-ils répéter leur erreur?».