Les militants du Parti socialiste français désignent jeudi leur nouveau chef dans une compétition marquée par un duel de dames entre Ségolène Royal et Martine Aubry, avec l'espoir de mettre un terme à une guerre interne dévastatrice pour la principale formation d'opposition.

Après plusieurs mois de lutte d'influence et un congrès à Reims (nord-est) qui a donné lieu le week-end à des affrontements d'une grande brutalité, les 230.000 militants auront jeudi, et peut-être vendredi, le dernier mot.

Trois candidats se présentent à leurs suffrages. Martine Aubry, 58 ans, maire de Lille (Nord) et initiatrice de la semaine de travail de 35 heures, est la tenante d'un PS ancré à gauche, en phase avec le mouvement ouvrier et syndical.

Ségolène Royal, 55 ans, ancienne rivale malheureuse de Nicolas Sarkozy à la présidentielle de 2007, mêle des thématiques très à gauche, une volonté d'ouvrir largement le parti à de nouveaux adhérents et la possibilité d'une alliance au centre.

Le troisième candidat, Benoît Hamon, jeune eurodéputé de 41 ans, incarne l'aile la plus à gauche du parti et joue la carte du renouvellement.

Si aucun des trois compétiteurs n'obtient jeudi la majorité, soit 50% des voix, un second tour sera organisé vendredi. C'est l'hypothèse la plus probable.

«J'ai l'impression qu'on a désormais plus de colère entre socialistes que contre la droite. Ca m'inquiète, je trouve que ça dégénère», relevait cette semaine Benoît Hamon, face à la montée des tensions entre les différents clans. Selon lui, le péril est tout simplement «la disparition du Parti socialiste».

Le débat entre socialistes s'est concentré sur la personnalité de Ségolène Royal, et son inclinaison à envisager des alliances avec le centriste François Bayrou.

Ségolène Royal a dénoncé un «front» dirigé contre elle au sein du parti. Entourée d'une jeune garde et de quelques barons régionaux, elle est marginalisée dans l'appareil du parti, mais reste très populaire parmi les militants. Lors d'un premier vote, le 6 novembre sur les projets pour le PS, elle avait, à la surprise générale, devancé tous ses concurrents, avec 29% des voix.

Mais aucun n'a voulu faire alliance avec elle pour former une majorité au sein du parti. Et au lendemain du Congrès, le ralliement du maire de Paris Bertrand Delanoë à Martine Aubry est apparu comme un coup très dur pour le camp Royal.

Désormais, c'est Martine Aubry qui fait figure de favorite, même si le jeu des pronostics est extrêmement risqué, s'agissant d'un vote interne qui ne fait l'objet d'aucun sondage. «Dès la semaine prochaine, les socialistes seront au travail», a assuré Mme Aubry mercredi au quotidien Le Parisien, affirmant qu'en cas de victoire, elle tendrait la main à Ségolène Royal.

Fille de l'ancien président de la Commission européenne Jacques Delors, Martine Aubry cherche à moderniser son image, qui reste indissociablement liée à la loi très controversée sur les 35 heures. Cette loi est remise en cause par la droite au pouvoir, qui l'a considérablement assouplie et a voulu en faire le symbole d'une gauche, dont elle stigmatise l'approche centralisée et archaïque.

«Le renouvellement, ce n'est ni l'âge ni l'image», a-t-elle plaidé mercredi, en assurant que, dans un PS aussi divisé, le prochain Premier secrétaire ne pourrait prétendre automatiquement au statut de candidat à la présidentielle de 2012. Un processus de désignation serait ainsi organisé en 2011.