Donald Trump a été accusé jeudi par l'État de New York d'avoir utilisé l'argent de sa fondation à des fins personnelles, une attaque qui touche au coeur des affaires du président américain, immédiatement qualifiée de «ridicule» par ce dernier.

La plainte au civil déposée jeudi par la procureure de l'État de New York vient ajouter aux nombreux ennuis juridiques du président, déjà assigné en justice par deux femmes avec lesquelles il aurait eu des liaisons, et confronté à une vaste enquête menée par le procureur spécial Robert Mueller sur d'éventuels liens entre son équipe de campagne et la Russie.

Si la procureure, Barbara Underwood, a indiqué avoir prévenu le fisc et la Commission électorale fédérale de violations présumées sur lesquelles ils pourraient eux aussi vouloir enquêter, l'affaire ne devrait pas apporter un élément décisif à ceux qui plaident pour une procédure de destitution.

Elle touche néanmoins directement à la gestion des affaires du président et à la société new-yorkaise qui chapeaute ses avoirs, la Trump Organization, installée dans la Trump Tower, sur la 5e Avenue de Manhattan.

Alors que les démocrates accusent depuis des mois Donald Trump de conflits d'intérêt pour ne pas avoir vendu ses parts dans la Trump Organization, la plainte met en lumière l'imbrication entre la fondation et sa société, qui gère surtout des hôtels et clubs de golf, aux États-Unis et à l'étranger.

L'assignation affirme notamment que la fondation, créée en 1987 mais à laquelle Trump ne donnait plus lui-même d'argent depuis 2008, n'avait pas d'employé propre.

Pas d'employé, pas de contrôle 

Son conseil d'administration, où siégeaient les enfants Trump, n'existait que sur le papier, et ses dépenses étaient directement réglées par la Trump Organization, non pas en fonction de leur objectif  charitable, mais uniquement en fonction du statut fiscal du destinataire du chèque.

Sans contrôle, M. Trump aurait ainsi utilisé la fondation pour payer des frais personnels, promouvoir ses hôtels ou clubs de golf, et même peser sur sa campagne électorale, ce qui est strictement interdit par la loi.

La plainte cite notamment une levée de fonds organisée le 28 janvier 2016 dans l'État de l'Iowa, présentée comme une opération charitable pour les anciens combattants alors qu'elle avait tous les attributs d'un rallye électoral. Ce qui pourrait constituer une violation des règles sur le financement des campagnes.

Elle cite aussi un paiement de 20 000 dollars pour le compte d'une association d'aide aux jeunes avec des difficultés d'apprentissage, qui aurait servi à payer une toile représentant Donald Trump.

«La Fondation Trump n'était guère plus qu'un chéquier pour régler les dépenses de M. Trump et de ses entreprises à des organisations à but non lucratif, quelles que soient leur raison d'être et leur légalité», a affirmé Mme Underwood.

Elle a lancé une action pour dissoudre la fondation et exiger la restitution de quelque 2,8 millions de dollars.

Elle demande aussi à ce que le président américain soit interdit de diriger une organisation à but non lucratif à New York pendant 10 ans, tandis que ses enfants seraient eux interdits de direction pendant un an.

Trump contre-attaque 

Aussi frappantes que puissent paraître ces accusations pour un président en exercice, elles ne sont pas nouvelles.

L'enquête sur la fondation de Donald Trump a commencé en juin 2016, près de six mois avant son élection à la Maison-Blanche, après des révélations du Washington Post qui mettait le doigt sur des paiements douteux.

Jeudi, le président, qui fêtait son 72e anniversaire, a contre-attaqué dès l'annonce de l'assignation.

Il a mis en cause les motivations de la procureure, nommée il y a un mois, à poursuivre cette affaire, soulignant que même son prédécesseur pro-Hillary Clinton, Eric Schneiderman, «n'avait jamais eu le courage de poursuivre cette affaire ridicule».

Trump a aussi accusé les «démocrates véreux» qui dirigent l'État de New York de «tout faire pour l'attaquer en justice».

Il a aussi assuré qu'il refuserait de régler cette affaire à l'amiable, comme il en a réglé d'autres assignations au civil.

Une porte-parole de la Trump Organization, Amanda Miller, a elle aussi longuement dénoncé «les motivations politiques évidentes» du bureau de la procureure, rappelant qu'il n'avait jamais jugé nécessaire d'enquêter sur la puissante fondation dirigée par les Clinton, également située dans l'État de New York, comme le demandait Trump.

Elle a aussi souligné que la fondation avait annoncé dès décembre 2016 qu'elle entendait se dissoudre et donner ses fonds restants - plus de 1,7 million de dollars - à des oeuvres charitables. La dissolution comme la dispersion des fonds ont cependant été bloquées par l'enquête.