Le célèbre lanceur d'alerte américain Daniel Ellsberg, 87 ans, a appelé vendredi le chef du Pentagone Jim Mattis à protéger le monde d'éventuelles décisions militaires irréfléchies du président Donald Trump.

«La situation est plus proche de l'utilisation possible d'armes nucléaires qu'à n'importe quel moment depuis, je dirais, cinquante ans», a déclaré à l'AFP Daniel Ellsberg dans une interview par téléphone.

Ancien analyste militaire de haut niveau, M. Ellsberg a acquis une célébrité mondiale il y a près d'un demi-siècle en faisant fuiter des milliers de documents qui révélaient que plusieurs gouvernements américains avaient menti au public sur la guerre du Vietnam.

Les documents en question sont connus sous le nom de «Pentagon Papers».

«C'est une période très dangereuse», a déclaré l'octogénaire, évoquant les récentes tensions entre les États-Unis et la Corée du Nord et la crise en cours liée aux accusations d'utilisation d'armes chimiques par le gouvernement syrien.

Revenant sur la guerre des mots qui a opposé il y a quelques mois M. Trump au numéro un nord-coréen Kim Jong Un, l'ancien analyste a souligné que était la première fois depuis la crise des missiles de Cuba en 1962 qu'un président des États-Unis menaçait d'une action militaire un autre pays doté de l'arme nucléaire.

Actuellement, cinq puissances nucléaires, les États-Unis, la Russie, la Grande-Bretagne, la France et Israël sont concernées à divers degrés par la crise en Syrie, a relevé M. Ellsberg.

Cette situation et la forte pression politique qui s'exerce actuellement sur le président Trump à Washington pourraient facilement provoquer un désastre, a-t-il estimé.

«Je crains que le président (Trump) n'ait une très forte tentation de déclencher une guerre comme couverture de son (éventuel) limogeage du procureur spécial» Robert Mueller, a déclaré Daniel Ellsberg.

Le procureur spécial enquête notamment sur les soupçons d'ingérence russe dans l'élection présidentielle américaine de 2016 et de collusion entre l'équipe de campagne de M. Trump et des responsables russes.

La Russie dément toute ingérence, et M. Trump nie catégoriquement toute collusion entre son équipe et Moscou.

Pour M. Ellsberg, le ministre américain de la Défense Jim Mattis devrait être prêt à s'opposer à d'éventuels ordres «impulsifs et irréfléchis» de M. Trump.

Utilisant le surnom de l'ancien militaire Jim Mattis, «Mad Dog» («Chien enragé»), Daniel Ellsberg a insisté: «Nous dépendons de Mad Dog Mattis pour nous protéger d'un président».